Mon Charlie H,
Mon Amour,
Notre histoire d’amour vient de prendre un sacré coup. On doit surmonter une crise comme on dit. Une crise sans précédent. Une crise grave. De celle qu’on ne peut pas prendre à la légère. De celle qui te glace, qui te fait faire du sur place. Tout s’arrête d’un coup sec. Tu sais que plus rien ne sera comme avant. La vie continuera, évidemment, mais tu ne seras plus tout à fait dedans. Tu te tiendras, à côté, peut être pour mieux regarder. En fait, je ne sais pas, je ne sais plus.
Tous les drapeaux sont en train de tomber à tes pieds, tous les Présidents, tous les Puissants vont parler de toi comme si ils t’avaient toujours lu, toujours aimé. Tous vont se mettre une balle dans le pied sans penser que toi, tu la portes au cœur.
Etre tué pour un trait d’esprit, voilà ta destinée. Je te jure Charlie, si tu voyais ça. Ça t’aurait inspiré tes plus belles caricatures.
Tu sais de celles que je ne recevrais plus. Et tes petits mots caustiques, ceux qui me remontaient le moral. Tu avais toujours la bonne idée. Au bon moment. Pour me faire oublier ce qui me faisait pleurer en secret. Toi, tu savais qu’il fallait continuer. Coûte que coûte. Quoi qu’il arrive. Tant que tu tenais debout. Qu’est ce que tu dirais aujourd’hui sur la fin de notre histoire d’amour ?
Qu’est ce que tu dirais aux trois barbares qui nous séparent ? A ces trois sauvages qui nous ravagent ?
Une mort annoncée, même pas sur papier. Je ne comprends pas ce qu’on a fait pour mériter ça. En une seconde. Le vide. Un long silence. La correspondance est finie. Hara-kiri à notre amour.
J’avais encore tant de choses à te dire tu sais Charlie. C’est toi que j’ai toujours le plus aimé. C’est irrationnel, inexplicable à un néophyte.
C’est tout de même toi qui m’as appris ma philosophie. Dans la vie tu choisis soit le pouvoir d’aimer soit l’amour du pouvoir.
Tu m’as aussi appris le pouvoir de la liberté d’aimer. Tu m’as appris à écrire, à savoir faire rire. Avec toi à mes côtés je devenais différent, je pouvais me faire remarquer. On savait que je pensais différemment. Que je serais forcement à part. Déclassé d’une certaine façon. Mais peu importe je recevais de l’amour toute les semaines, l’essentiel était là.
Tu sais, même avec les années, je te trouvais encore très beau. Tu étais unique, ne cherchant à ressembler à aucun autre. Là où Charlie H. était, tout pouvait se passer. Jusqu’au pire apparemment.
Aujourd’hui mon Charlie, je te vois t’afficher sur tous nos écrans. C’est dégoulinant. Mais en même temps mon Charlie je suis en train de comprendre que tu as contribué à fabriquer l’ADN Français. Il fallait bien s’attendre à un moment donné à un destin national. Charlie H. tu es en train de faire du bruit comme jamais. A l’image de tout l’amour que tu as pu donner à tant de cœurs politiques blessés. Ta dernière Une est mondiale, révolutionnaire et incontrôlable. Charlie H. tu es peut être sur le point de devenir une icône punk. Tu vas rentrer dans le dictionnaire. Sans avoir à payer tes dettes. Sans rendre de comptes. Sans discours officiel. Je te jure mon Charlie H. tu n’en reviendrais pas. Le peuple est là. Au rdv. Ce soir, chaque citoyen s’endormira en pensant à toi. Tu connais ma jalousie maladive, surtout te concernant, mais là, franchement, je pleure de joie de te partager au monde. Tout d’un bloc. La France avait besoin de toi. C’était maintenant. Il fallait ce rassemblement. Il fallait qu’on pleure tous ensemble, main dans la main. Qu’on ose se dire que c’était la mort de trop. Qu’on arrête de ne penser qu’à nous pour se retrouver, enfin, au moins un instant. Sans le savoir on va se servir de toi pour reprendre le temps de s’aimer tous un peu plus les uns les autres. C’est peut être plus que ce que tu n’as jamais espéré. Charlie H. j’espère être le premier à te l’annoncer mais te voilà immortel. Le monde t’a dans la peau. Notre histoire est devenue universelle.
Avec tout mon amour.