Ainsi donc ce serait la fin
Cela fait longtemps qu’on l’annonce mais les signes se multiplient. On s’acharne, on s’accroche à toutes les bouées. On lutte. Parfois on se construit des bouées. Parfois on propose à Gilles Verdez d’aller en direct prendre une petite mandale de la main de Joey Starr. Cible verrouillée, perruque ajustée. Et ce bon vieux Gilles qui a autant de jugeote que de respect pour lui-même ainsi que pour les perruquiers parisiens, fonce se frotter au bad boy dont la réputation est de notoriété nationale. Après tout, c’est pour ça qu’il a été choisi, non ? Il s’agit là du fameux syndrome ‘’Bernard Pivot’’ du nom de celui qui, en 1978, pensait pouvoir inviter Bukowski sur son plateau et discuter paisiblement de littérature avec l’énergumène. A moins qu’il ne s’agisse d’un complot, Joey Starr serait dans le coup et jouerait le jeu contre rétribution. Cela lui permettrait de casser son contrat avec la production et de ne plus participer à l’émission de la fabrique des nouvelles stars. De partir sans pertes donc mais avec l’habitude du fracas. On ne saura sûrement jamais. Voilà qui tombe bien, on s’en fout.
Il se dit que la nature a horreur du vide
Il faudrait donc s’acharner à le remplir. On fait ça avec tout, tous les jours. On remplit son bol de café, on remplit le réservoir de sa bagnole, on remplit son caddie, on remplit les pages des journaux, on remplit les serveurs informatiques… Mais il existe des vides que l’on ne peut pas combler. Le contenu de Touche Pas à Mon Poste compte parmi ces vides. Quelqu’un a cru que les seins d’Enora Malagré suffiraient mais les seins c’est has been, pas vrai ? Internet regorge de seins, le marché est en saturation permanente et les montrer à la télévision est signe d’une grande régression. Cela nous ramène à Stéphane Collaro, à la Cicciolina… Ce genre de souvenir qu’on ne veut pas voir ressurgir. Mais pourtant c’est le vide, le creux total. Et ça se voit de plus en plus parce que le moindre truc devient une nouvelle planétaire. « Exclusif ! Machin a éternué en direct !!! Découvrez les images après la pub !!! »!!! Alors quoi ? On abandonne ? On laisse tomber le gros magot ? Non ! On cherche du buzz. C’est un mot magnifique, buzz. C’est la source d’un bonheur infini. C’est la promesse de lendemains qui chantent, au moins en termes d’audience. C’est une fontaine d’espaces publicitaires vierges. Le buzz c’est la providence de l’idole des beaufs. Le râtelier où viennent paitre les moutons cathodiques.
S’il n’y a pas de buzz, on peut en fabriquer. Un petit scenario tout pourri fera l’affaire. Un guignol de service, au fort potentiel sympathique et affublé d’une perruque qui évoque les grandes heures de Nicoletta, fera office de victime. Déluge de caméras afin de multiplier les angles et : « action ! ». Le texte est minable, c’est très surjoué mais après tout, Verdez n’est pas acteur. Le type tente un contact physique, ça sent déjà un peu la poudre. Il ne faut pas longtemps après la première semonce pour que le « geste violent » surgisse de l’agacement.
Hanouna baisse alors le pouce comme le faisait l’empereur romain pour condamner le gladiateur vaincu et son public, sa plèbe idolâtre, se met à huer l’auteur du « geste violent » dans un beuglement de haine aux ordres. Hanouna eut-il été hilare qu’un rire choral aurait parcouru les gradins. Aurait-il fait le V de la paix que des joints auraient été roulés illico et des fleurs lancées de toutes parts dans un élan d’amour fraternel. On n’ose à peine imaginer la partouze géante en direct si Hanouna avait frotté son sexe sur l’une de ses chroniqueuses….
L’ensemble est tellement mal fait, tellement grossier qu’on pourrait presque croire qu’il est prêt à entrer en politique.
C’est la méthode Hanouna, comparable de par son vide qui laisse pantois à la méthode Cauet, autre trublion dénué du moindre talent et qui a déjà officié sur petit écran.
Hanouna, l’amuseur en carton-pâte. Le clown cocaïne qui voudrait tremper son nez rouge dans la colline de poudre de Tony Montana. Le grand liquidateur de la pensée, financé à outrance pour se répandre dans les cerveaux de tous ceux qui voudront bien se laisser faire. Place au divertissement.
Seulement voilà, il est des choses contre lesquelles on ne peut pas lutter. La mort par exemple. La mort de Prince (alias Love Symbol) en particulier. Car si le buzz a fonctionné 24 heures, le décès d’un véritable artiste laisse peu d’espoir aux prétentions puériles d’un homme sans talent. Nombre d’internautes ont vite fait savoir qu’ils n’en avaient rien à foutre qu’un zozo prenne un quart de gifle au travers de la tronche. Et la violence n’est pas là. Mais depuis l’annonce du décès du chanteur, chez TPMP il va falloir ramer et ramer pour faire avancer la galère.
Et quand bien même personne ne serait venu compromettre ce plan sordide par sa propre mort, est-il possible de croire une seconde que chaque fois qu’un abruti prend une petite mandale il faut que ce soit un évènement ? Si c’était le cas, il n’y aurait jamais assez d’encre sur Terre pour remplir les journaux et les serveurs internet seraient saturés en permanence.
Le NY Times ne fera pas sa Une plusieurs jours d’affilée avec cette non-affaire. On ne projettera pas la scène en boucle sur la Grande Muraille de Chine. La NASA n’enverra pas l’info à Curiosity afin que le robot la grave sur le sol martien.
Non. Tout le monde s’en fout.
Cela nous rappelle ce tweet qu’on a vu passer il y a quelques temps :
« DE NOS JOURS, LES CHOSES VONT TELLEMENT VITE QU’ON A PLUS LE TEMPS D’EN AVOIR RIEN A FOUTRE D’UN TRUC QU’IL FAUT DEJA EN AVOIR RIEN A FOUTRE DU SUIVANT » .
Alors voilà, c’est donc la fin. Mode autodestruction activé. Cela aurait pu être un formidable outil d’éducation. D’élévation même. Mais la télévision meurt de plus en plus et de plus en plus vite. Les hyènes se battent à mort pour arracher sordidement les derniers morceaux juteux sous le regard fasciné d’un troupeau bêlant ce qu’on lui dira de bêler. Et la seule bonne nouvelle c’est que Cyril Hanouna est l’une de ces hyènes et qu’il disparaitra avec le reste de la meute. Car il ne sait rien faire d’autre.
Au suivant.