RICARD BURTON : Monsieur Attali pour une raison que je ne comprends absolument pas, vous ne semblez pas vouloir quitter la scène intellectuelle alors que fondamentalement vous n’avez que le niveau d’un apprenti attaché de presse. Comment avez-vous fait votre trou quand d’autres vous verraient dedans ?
JACQUES ATTALI : La prohibition, la contrefaçon, les menaces, la torture, le lobbying. Voici les ingrédients de la recette magique que je prodigue à chacune de mes classes, chaque jour dans mon école que j’ai créée, rue de la Pompe, en même temps qu’un restaurant fallafel classé N°1 des ventes dans le guide I Kiff Bethléem.
RICARD BURTON : Quel est donc ce besoin de truster le devant des médias ? Vous voilà commencer 2011 avec une nouvelle idiotie. Votre idée d’interdire de fumer unilatéralement, nous prépare avec gourmandise un futur dans lequel personne ne voudra vivre à part les cadres sup’ vivant à Courbevoie ou Rueil Malmaison. C’est parce qu’avec ce gouvernement vous avez le sentiment d’avoir les coudées franches, raconter les plus grosses inepties et qu’elles seront éventuellement votées que vous vous permettez tant d’âneries ?
JACQUES ATTALI : Vous savez Ricard, dans mon école on y rentre avec le BEPC. Vous n’avez pas le bac ? Peu importe, nous ne faisons aucune discrimination. Du moment que vous possédez un compte Premier, nous vous promettons la création d’un réseau comme nul autre pareil. Et puis je vais vous dire mon petit père à la mine fuel, votre attitude peu avenante à mon encontre pourrait vous coûter à vous aussi une interdiction, la vôtre. Nous avons déjà collé des africains pour moins que cela en taule. Il me suffirait de passer une loi sur la dangerosité de vos sécrétions et je vous renverrais dans votre pays à la manière d’un tube pneumatique.
RICARD BURTON : Et comment feriez-vous pour sortir trois livres par an si je n’étais pas à vos côtés chez Jacques ?
JACQUES ATTALI : C’est vous mon nègre ? Faites voir un peu. Je ne prends que des décalottés.
RICARD BURTON : Justement, pour parler de votre carrière d’essayiste. Vous êtes constamment décrié pour le manque de rigueur qui semble caractériser vos ouvrages. Cela ne vous empêche pas de conserver une crédibilité presque intacte aux yeux du grand public.
JACQUES ATTALI : Le grand public m’importe peu. Je ne fais pas écrire des essais par d’autres pour plaire au grand public comme vous dites. Il existe un filtre entre moi et le citoyen de base qui gagne, disons deux mille euros par mois. Ce qu’il pense m’importe peu car mes ouvrages sont destinés aux gens cultivés, aux élus, à ceux qui veulent comprendre l’avenir. Autant dire que ceux qui ne vivent pas dans le seizième ont très peu de chance de saisir l’essence de mes écrits.
RICARD BURTON : Politiquement parlant, on vous sent très ouvert au plus offrant. Comment arrivez-vous à donner autant d’élasticité à votre croupe vieillissante ? Un conseil à donner aux plus jeunes ?
JACQUES ATTALI : Il s’agit ici de survie. Lorsque la dictature française que nous connaissons actuellement aura cessé, je ne voudrais pas me retrouver les deux pieds dans le même sabot et perdre, mes terres dans le Larzac, mes avantages en nature. J’ai des bouches à nourrir à commencer par la mienne dans laquelle je vous accueillerais bien si vous ne voyez aucun inconvénient à quelques dents cariées à force de trop racoler.
* Interview réalisée avec Jacques AttaLigue 2