Jean-Michel Macron s’inquiète d’une possible arrivée au pouvoir de l’extrême droite, qu’il exècre. Le père du président, qui était au courant du projet de dissolution, nous confie en exclusivité ce que son fils lui a dit lors d’un déjeuner en tête-à-tête deux mois avant les élections européennes.
Jean-Michel Macron n’a pas été surpris quand son fils a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin, provoquant un tremblement de terre politique. « Sa décision de dissoudre n’est pas venue du résultat des élections européennes. Il m’en avait déjà parlé deux mois plus tôt. Il estimait en effet que l’Assemblée nationale était devenue ingouvernable », confie le père du président de la République, dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé mardi 2 juin à Amiens (Somme), à notre initiative.
Le RN ? « Si les Français le veulent, ils en feront l’expérience »
Comme de nombreux Français, Jean-Michel Macron se dit inquiet à la veille du second tour. « Oui, j’ai peur que le Rassemblement national arrive au pouvoir. Maintenant, si les Français le veulent, ils en feront l’expérience. Ils verront le résultat. Il vaut mieux que la France en fasse l’expérience pendant deux ans plutôt que pendant cinq ans. Si le RN montre en deux ans qu’il est parfaitement incapable de gouverner, on peut espérer qu’il n’ira pas plus loin. C’est un peu ce que mon fils m’avait dit deux mois avant les élections européennes », raconte le père d’Emmanuel Macron, qui vit toujours à Amiens, dans la maison où il a élevé son fils.
Jean-Michel Macron ne croit pas à une démission de son fils, même si la France devient ingouvernable. En tout cas, Emmanuel Macron n’en a pas parlé avec son père. « J’espère simplement qu’après la fin de son mandat en 2027, il fera autre chose que de la politique. »
Le père du président jette un regard sévère sur le monde politique. « Mon fils a fait des choses originales mais il n’est pas suivi. Je suis déçu par le comportement de certains ministres, comme Bruno Le Maire qui retourne sa veste. »
En 2022, Jean-Michel Macron disait approuver 80 % de ce que faisait son fils à l’Élysée. Il n’a pas changé d’avis. « Il fallait faire la réforme des retraites même si elle ne plaisait pas aux Français, compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie. Moi, j’ai travaillé jusqu’à 73 ans comme médecin hospitalier. J’ai dû partir à cause de la limite d’âge. »
Le père du président dresse un bilan positif de son action. « Je ne pense pas qu’il ait commis de grosses erreurs, peut-être des maladresses dans la façon d’annoncer les choses. Il n’y a pas beaucoup de politiques qui auraient été capables de sortir d’une crise comme celle des Gilets jaunes », observe-t-il.
« J’aime bien François Ruffin, un bon député »
Jean-Michel Macron ne vote pas dans la 1ère circonscription de la Somme où le député Nouveau Front populaire sortant François Ruffin est en difficulté face à la candidate du RN. Il approuve toutefois le désistement de la candidate macroniste.
« J’aurais voté François Ruffin par défaut si j’étais dans sa circonscription car je ne voterai jamais pour le RN. J’aime bien François Ruffin. C’est un bon député. Il a un esprit assez ouvert, même s’il est parfois excessif et provocateur, mais il y a pire que lui. » Une cohabitation entre son fils et François Ruffin comme Premier ministre de gauche ? L’idée lui caresse l’esprit un moment. « Deux Amiénois au pouvoir, ce serait amusant mais je n’en suis pas à ce point-là », dit-il.
Par contre, il n’a pas de mots assez durs contre Jean-Luc Mélenchon. « Lui, il est fou. » Le père d’Emmanuel Macron appliquerait le « ni-ni » s’il devait choisir entre un mélenchoniste et un RN. « Je serais bien embêté car les mélenchonistes sont d’une grossièreté insupportable. »
Emmanuel Macron n’a pas prévu de s’arrêter à Amiens dimanche prochain avant d’aller voter au Touquet, la station balnéaire où sa femme Brigitte a une résidence secondaire. Son père s’est fait une raison. « Je ne vois pas mon fils très souvent. Dimanche dernier, c’était mon anniversaire et il ne me l’a même pas souhaité », plaisante-t-il, avant de reconnaître que son fils a des choses plus importantes à gérer en ce moment.
Source : Le Progrès