Attention, les médiocres ont pris le pouvoir ! Selon le philosophe québécois Alain Deneault, « la Médiocratie », n’est pas qu’un désarmement intellectuel : elle constitue aussi l’outil du démantèlement de la souveraineté des États au profit de celle des multinationales.
Comme il l’explique très bien, « rangez ces ouvrages compliqués, les livres comptables feront l’affaire. Ne soyez ni fier, ni spirituel, ni même à l’aise, vous risqueriez de paraître arrogant. Atténuez vos passions, elles font peur. Surtout, aucune bonne idée, la déchiqueteuse en est pleine. Ce regard perçant qui inquiète, dilatez-le, et décontractez vos lèvres – il faut penser mou et le montrer, parler de son moi en le réduisant à peu de chose : on doit pouvoir vous caser. Les temps ont changé (…) : les médiocres ont pris le pouvoir. »
La naissance de cette révolution anesthésiante est d’une dangerosité sans précédent pour l’humanité. Si l’on regarde de plus près dans notre quotidien. L’homme qui monte le ton est devenu un « extrémiste ». L’homme qui ne veut pas croire ou remettre en cause les vérités officielles est devenu un « complotiste ». Et l’homme qui s’essaye à la critique devient un « hater ».
On comprend alors le piètre état de la recherche universitaire, de la perversion du langage et du nouveau règne des experts.
En occident, il est vrai, depuis un moment, que tout est moyen. Ou médiocre. Au choix.
Le moyen a atteint son stade paroxystique, au point de passer au rang d’autorité.
Aujourd’hui, il faut penser moyen, désirer moyen, agir moyen tout en évitant les initiatives créatives, ne jamais sortir des sentiers battus, s’habiller comme son voisin, parce que simplement, médiocre et rampant on arrive (peut-être) à tout ?
En même temps, depuis qu’on ne veut plus un « métier » mais un « emploi », qu’on ne pratique plus de licenciements mais des « plans sociaux », que l’écologie politique se transforme en « développement durable », que la « gouvernance » se substitue à la démocratie et qu’on ne consomme plus de la culture mais du contenu, il fallait en venir à l’évidence qu’il n’y a plus de frontières claires entre la recherche universitaire, l’expertise et le lobbying.
Si l’on prend l’exemple des universités qui ne voient rien de mal à vendre des connaissances, voire un discours, directement aux lobbys et autres groupes d’intérêts. De la même manière qu’en 2004, Patrick Le Lay, PDG de TF1, avouait sans scrupule que «ce que [TF1 vend] à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible», l’université vend de nos jours du temps de cerveau savant aux entreprises.
Alain Deneault rajoute, très justement, « on nous demande de n’être rien de plus qu’un portrait-robot. De n’avoir rien de plus à afficher, à affirmer, à manifester qu’une activité moyenne, qu’une connaissance moyenne, qu’un désir moyen. Il faut être paramétrable.[…] Face à un ordre qui met en péril 80 % des écosystèmes, qui permet à 1 % des plus riches d’avoir 50 % des actifs mondiaux, qui détruit sous nos yeux l’état social, on ne peut pas se permettre de continuer à jouer le jeu, de faire nos trucs dans notre petit coin, de monnayer nos petits avantages en pensant à la petite semaine. » Rien de plus à ajouter. A part peut-être que nous avons un allié de plus dans La Société des Infiltrationnistes.