Les instituts d’études sont au moins sur d’une chose cette année : 2010 sera l’avènement du storytelling. Apres l’explosion du marketing viral puis des médias sociaux, voici venu le temps du Storytelling. Popularisé en France grâce à l’ouvrage de Christian Salmon, on est forcé de constater aujourd’hui que cette machine à raconter des histoires a de beaux jours devant elle.
Depuis les années 90, les politiques ont mis la main sur l’arme. « Storytelling », c’est un monde : un polar, un manuel de résistance, un ouvrage d’analyse, un livre d’histoire contemporaine. Une étude à la fois très pointue et aisée d’approche. Christian Salmon, qui connaît le réel comme la fiction, et les chercheurs comme les écrivains, y livre un décryptage de la communication capitaliste et politique. Qui, aujourd’hui, ne diffèrent guère. Autrement dit le Storytelling est la version moderne de l’art de la transmission et de la conviction par le pouvoir des histoires. Il consiste à faire émerger une ou plusieurs histoires à fort pouvoir de séduction et de conviction. Selon le principe que pour parler à la tête, il faut souvent d’abord toucher le cœur – passer par l’émotion pour atteindre la raison.
La fiction romanesque et cinématographique avait compris ce qui se tramait :
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Christian Salmon nous apprend dans le « Monde Diplomatique » ce qui se passe dans les studios de télé-réalité, comme sur la console de jeux vidéo (cf vidéo), sur les écrans des téléphones portables et des ordinateurs, de la chambre à coucher jusqu’à l’automobile, la vie quotidienne est en permanence enveloppée dans un filet narratif ou un voile qui filtre les perceptions, stimule les affects, organise les réponses multisensorielles ; ce que les chercheurs en management conceptualisent comme des « expériences tracées ».
L’injonction à consommer se transforme de plus en plus en une incitation à se raconter. Une tendance apparue, selon CyberJournalist.net, après le 11-Septembre, lorsque les témoignages à la première personne ont commencé à affluer sur le Web, produisant une masse d’informations, d’anecdotes, d’impressions personnelles que l’écrivain américain Don Delillo n’hésitait pas à qualifier de « contre-narration », un récit chaotique façonné par la rumeur, l’imagination, et les échos mystiques : « Une histoire fantôme de faux souvenirs et de pertes imaginaires. »
Pour être plus pragmatique, Stéphane Dangel, créateur du blog sur le Storytelling, nous apprend qu’il existe aussi sur le web des moyens privilégiés pour faire du storytelling. En voici les principaux exemples :
• John Caddell a créé la communauté Mistakebank sur Ning, qui est une invitation à raconter les histoires de ses échecs professionnels (car on apprend beaucoup plus de ses échecs que de ses succès) ;
• EtherPad : qui revendique être le seul outil permettant de faire du travail collaboratif online réellement en temps réel : idéal pour construire une histoire collaborativement, façon wiki (et pour d’autres usages en dehors du storytelling) ;
• La plate-forme Helia, qui permet de faire du storytelling de recrutement ;
• Les wikizines de Zimbio, pour faire des magazines interactifs (des wikis magazines en fait) ;
• Post Secret : où tout le monde peut poster un secret-histoire perso (version française : postsecretfrance.blogspot.com/) ;
• Le groupe 365Days sur Flickr : chaque jour de l’année, un auto-portrait, pour raconter son histoire ;
• le projet Magnum in Motion, de l’agence de photos Magnum : des photographes de l’agence racontent leurs photos ;
• le projet Rakontu, auquel participe Stéphane Dangel : projet de software en open-source pour permettre aux communautés de travailler sur leurs histoires (www.rakontu.org)