En enquêtant sur une fusillade au cœur de la capitale, ils n’imaginaient pas lever le voile sur une officine du crime agissant sur l’ensemble de la France. Une organisation criminelle, composée de très jeunes tueurs à gages, prêts à supprimer des cibles contre un contrat monnayé.
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Un scénario digne d’un thriller. Selon nos informations, les policiers de la brigade criminelle de Paris et de l’Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO) ont interpellé, ce lundi 13 mars au matin, neuf hommes, notamment en région parisienne, près de Marseille et en Bretagne, soupçonnés d’appartenir à ce réseau responsable d’au moins un assassinat et de divers projets de meurtres.
Tout est parti d’un meurtre dans un bar à chicha
Tous ont été placés en garde à vue dans le cadre de cette enquête tentaculaire pilotée par la juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée (Junalco) du parquet de Paris. Certains des suspects, déjà incarcérés dans le cadre d’autres affaires, ont été extraits de leurs cellules par les enquêteurs.
Ce réseau a été identifié lors d’investigations discrètes menées sur le meurtre de Mamadou T., 38 ans, survenu le 18 juillet 2022 rue Popincourt, dans le XIe arrondissement. Ce soir-là, vers 21h35, deux hommes encagoulés descendent d’une Peugeot 308, armés de ce qui semble être d’un fusil d’assaut type AK47 pour l’un, d’un pistolet 9 mm pour l’autre. Ils ouvrent alors le feu en direction de clients attablés à l’intérieur d’un bar à chicha, La Petite Échappée.
Un homme meurt sur le coup lors de cette attaque et quatre autres sont blessés, dont le frère de Mamadou T. « Le crépitement de la Kalachnikov, c’était exactement le même bruit que lors de Charlie Hebdo », avait témoigné au Parisien-Aujourd’hui en France un habitant de la rue voisine Bréguet. Sur Twitter, le maire du XIe arrondissement, François Vauglin, avait, lui, dénoncé « un acte barbare » sur Twitter.
Un contrat sur la tête de la victime
Très vite après cette attaque ultra-violente, l’un des tireurs, armé du pistolet, parvient à prendre la fuite au volant de la Peugeot. Direction l’avenue Ledru-Rollin où sa trace se perd. « On a entendu des coups de feu et après on a vu un mec qui rentrait dans la voiture partie en trombe. Et là on a entendu des hurlements », avaient raconté à l’AFP Martin et Lucas, deux hommes qui buvaient un verre en terrasse. En revanche, le second tireur présumé échoue à s’enfuir. Il est stoppé par des clients de l’établissement, lesquels parviennent à le maîtriser en lui assénant des coups violents avant de le remettre à la police. « Ils l’ont tabassé notamment au niveau de la tête », nous avait expliqué une source proche de l’enquête.
Après avoir été hospitalisé, le suspect, identifié comme un adolescent de 16 ans originaire de la région parisienne et connu de la justice, est placé en garde à vue à la Crim’. Après 48 heures d’audition, il est mis en examen et écroué pour « assassinat en bande organisée, tentative d’assassinat en bande organisée, acquisition et détention sans autorisation d’armes de catégories A et B en réunion, et association de malfaiteurs ».
Le fusil d’assaut, dont il était semble-t-il porteur, a été retrouvé sur la scène du crime par les policiers. La voiture du fuyard, elle, est retrouvée 48 heures après le drame dans une cave de la cité populaire de Pissevin à… Nîmes (Gard), soit à 700 kilomètres de là. Intacte.
Alors que la fusillade laissait craindre à un acte terroriste au cœur de l’été, les investigations avaient rapidement pris l’orientation d’un règlement de comptes. La victime était connue des services de police pour des faits anciens et semblait être la cible de l’attaque.
L’identité du commanditaire toujours inconnue
Mais les enquêteurs de la brigade criminelle, rejoints par leurs collègues de l’OCLCO, ont découvert plus grave que cela : l’existence d’une structure criminelle qui aurait été engagée pour éliminer Mamadou T., sans que l’on sache encore l’identité du commanditaire présumé du contrat ainsi que ses motivations. Plus inquiétant encore, le trentenaire n’était, semble-t-il, pas l’unique cible de l’organisation.
Selon nos informations, les enquêteurs soupçonnent le réseau d’avoir fomenté, outre cette élimination, des projets de meurtres ou des tentatives maquillés en accidents.