L’affaire survient alors que la vague #metoo impacte le milieu du théâtre depuis la rentrée. Un agent artistique en lien avec des personnalités démodées du show-biz comme Bernard Menez, K.Maro, ou encore Jean-Pierre Castaldi, vient d’être rattrapé par une accusation de viol sur mineure pour des faits qui remontent à 1995 et 1996.
Selon les informations de RTL, Patrick Perna est accusé par une femme âgée aujourd’hui de 40 ans d’avoir abusé d’elle alors qu’elle n’avait que 14 ans en lui promettant des rôles. Il a été mis en examen pour ces faits la semaine dernière par un juge de Nanterre dans les Hauts-de-Seine. L’homme n’est pas inconnu des prétoires puisqu’il a déjà été condamné à deux ans de prison en 2016 pour des agressions sexuelles sur deux jeunes comédiennes majeures. Et selon nos informations une autre plainte pour viol a été déposée à Paris par une quatrième actrice qui l’accuse d’agression sexuelle et d’escroquerie.
Dans sa plainte, Aurélie, raconte qu’en 1995 l’homme alors âgé d’une quarantaine d’années l’a abordée sur le chemin du collège. « Il m’a dit qu’il était agent, qu’il me trouvait jolie, et qu’éventuellement il pourrait me faire faire des films », raconte-t-elle à RTL. L’imprésario sulfureux rencontre ses parents, les « met en confiance », selon Aurélie, et commence à l’inviter chez lui.
Très vite, les demandes de « bisous comme au cinéma » succèdent aux photos dénudées, se souvient-elle aujourd’hui. Les pressions pour avoir des relations sexuelles se font insistantes : « Il disait que pour faire du cinéma il fallait que je dépasse ma timidité, que je sois une femme ». Aurélie cède alors qu’elle est vierge : « Il a réussi à me convaincre…. Quand on a 14 ans et qu’on veut briller et ben hop on fonce », relate celle qui ne voit plus du tout aujourd’hui l’histoire par le même prisme.
Patrick Perna déploie son jeu, emmène l’adolescente au théâtre, lui présente des acteurs relativement connus comme Jean Lefebvre et Bernard Menez. Leurs rencontres intimes se poursuivent pendant plusieurs mois. Mais Aurélie, toujours selon son récit, finit par rencontrer un garçon de son âge qui deviendra plus tard son mari. Elle s’éloigne de son « protecteur », ne raconte rien à personne et décide d’enterrer l’histoire. Elle se sent incapable d’en parler, ni à ses parents ni à son petit ami et tourne la page.
En 2016 pourtant, Aurélie décide de porter plainte, car entre temps, Patrick Perna a été visé par deux enquêtes pour agression sexuelle par des comédiennes. Et l’association « Stoppons les arnaques aux castings » (aujourd’hui devenue « Casting Info Service ») a lancé un appel à témoignages. Une vingtaine de jeunes femmes presque toutes actrices ont rapporté des histoires similaires : Patrick Perna leur a fait miroiter des castings et leur a demandé « parfois des photos érotiques, parfois de l’effeuillage, en tout cas de prouver qu’elles ne sont pas timides », se souvient James Chabert le président de l’association.
Ces actrices ne dénoncent pas d’agression sexuelle mais relatent des comportements troubles qui les ont mises mal à l’aise. Les policiers entendent plusieurs d’entre elles. Aurélie entend parler de ces « autres » affaires et décide de venir témoigner au procès de Patrick Perna. L’agent artistique est condamné à deux ans de prison dont un avec sursis. C’est à la suite de l’audience qu’Aurélie décide de saisir la justice. Aujourd’hui, informée de la mise en examen pour viol sur mineur, elle se dit soulagée que sa démarche ait enfin abouti : « Je veux qu’il paye. Il m’a fait perdre mon adolescence et mes illusions. J’espère que cela va finir par un procès qui servira à d’autres jeunes femmes », dit-elle.
Une nouvelle plainte pour des faits plus récents
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Une autre apprentie comédienne, majeure, a porté plainte pour « agression sexuelle » à l’encontre de Patrick Perna pour des faits beaucoup plus récents, de 2016 à 2018. Son récit ressemble farouchement aux précédents : la plaignante, prénommée Amélie, rencontre d’abord l’agent par un intermédiaire alors qu’elle n’arrive pas mettre pied dans la profession. Elle aussi croit aux soudaines promesses de casting de Patrick Perna et à ses conseils pour la faire démarrer.
Elle accepte ses demandes de tenues sexy et ses approches. Une relation de plusieurs mois se noue avec le soi-disant agent artistique, qui l’invite régulièrement dans sa maison avec piscine en Normandie. Une relation d’abord amicale et professionnelle puis intime. Un tunnel sous emprise selon elle, et dont la jeune femme a mis du temps à prendre conscience. « C’est un manipulateur, il me disait ‘si tu ne veux pas faire ça je ne peux pas te placer dans telle série’ donc du coup on culpabilisait puis on voulait tellement y arriver que sur le moment on perdait notre raison », raconte-t-elle à RTL.
« Toutes les comédiennes ne se sont pas retrouvées dans son lit mais y’en a certaines y compris moi, il nous a vraiment eues à l’usure. C’est comme une araignée qui emprisonne les petits insectes nous c’est exactement comme ça », dit-elle. Là encore Patrick Perna emmène la jeune femme à des galas, à l’ambassade de Russie notamment, elle dine avec lui chez Grace de Capitani où elle rencontre quelques célébrités, son mentor lui promet de déjeuner avec Fabrice Luchini, ce qui n’aura jamais lieu.
Elle coupe toute relation il y a trois ans et dépose plainte pour « agression sexuelle » et « escroquerie » lorsqu’elle réalise qu’elle s’est fait rouler dans la farine. Car la jeune femme affirme que son mentor l’a par ailleurs poussée avec un complice à investir 80.000 euros dans un projet bidon sans jamais lui rembourser les fonds. Aujourd’hui Amélie attend de savoir si le parquet de Paris va à son tour ouvrir une enquête après celui de Nanterre.
Des démêlés récents avec Danièle Gilbert
Le président de « Casting Info Service », James Chabert accueille favorablement la mise en examen pour viol de Patrick Perna : « Le mode opératoire de cet agent, comme d’autres nous a toujours posé question. Plus d’une vingtaine de comédiennes nous ont relaté immuablement le sien, une invitation à l’avant-première d’une personnalité qu’il dit connaître, puis ensuite l’invitation à un dîner puis l’alibi de ‘montre moi ce dont tu es capable pour rentrer dans mon fichier’. L’équation parfaite pour son emprise sur la jeune comédienne x ou y », dit-il.
Selon nos informations Patrick Perna, qui a aujourd’hui officiellement cessé ses activités d’agent artistique d’après l’agence avec laquelle il collaborait, continue cependant à jouer l’intermédiaire dans le milieu du spectacle. Il a même eu des démêlés récents avec Danièle Gilbert à qui il a proposé un spectacle qui n’a jamais eu lieu. Il est toujours en relation professionnelle avec Bernard Menez, ainsi qu’avec d’anciennes stars comme K.Maro ou Stone, de Stone & Charden. Il a en revanche cessé de fréquenter l’école de théâtre et de cinéma d’Olivier Belmondo après que le petit-fils de l’acteur a été prévenu de ses condamnations judiciaires.
Le long itinéraire de cette figure trouble du show-business interroge. D’après nos informations il avait été condamné dès 2003 pour « atteinte sexuelle », le délit qui punissait à l’époque une relation entre un adulte et une mineure de moins de quinze ans, aujourd’hui passible de poursuites pour viol. Contacté par RTL l’avocat de Patrick Perna, Philippe Benamou, n’a pas souhaité apporter de commentaire.