La télé «de qualité» sur le web est une réalité. Pour ceux qui auraient raté le train, ou pour ceux qui veulent une synthèse sur les quelques plateformes incontournables :
Joost , lancé en grande pompe en 2007 après un buzz très bien organisé autour du « Venice Project », était censé incarner la TV 2.0 et révolutionner le monde de l’audiovisuel, n ‘a pas véritablement marché.
Les chances de voir Joost débarquer sur le téléviseur se sont éloignées, et le catalogue a été victime du décollage rapide de Hulu aux Etats-Unis, le site créé par les grands studios audiovisuels américains. Surtout, Joost impliquait que les internautes téléchargent des vidéos, au moment où YouTube, Veoh, ou Dailymotion offraient aux internautes l’immédiateté de la vidéo en streaming sur le web. Trop compliqué, et trop discret, Joost n’a pas trouvé sa place malgré un financement impressionnant de 45 millions de dollars.
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Pour se rattraper, Joost a opéré un virage stratégique. Plutôt que d’imposer le téléchargement et le lancement d’un logiciel spécifique pour regarder des vidéos, la firme a mis au point un plugin à installer sur le navigateur qui permet de regarder les vidéos dans des pages web. La plateforme se dote également d’une interface orientée « réseau social », avec des flux RSS en abondance et des outils qui permettent de communiquer avec les autres utilisateurs et de voir qui regarde quoi. Malgré tout Joost offre à la différence de Youtube, Dailymotion, une image de belle qualité « visionnable » en plein écran. On trouve des programmes et des chaines éclectiques et atypiques comme Paranormal TV, Rap Entertainment TV, Lonely Planet, ou encore CNN International.
Mais n’est-ce pas trop tard ? Bien d’autres acteurs ont tenté de mêler P2P et diffusion en streaming sur le web, sans grand succès populaire. Citons parmi eux eux Octoshape, RedSwoosh, Neokast, Mediamelon, Selfcast… Sans un catalogue fort, tous les efforts faits par Joost seront vains A moins que le changement technologique ne s’accompagne d’un changement philosophique, et que Joost s’ouvre enfin à la diffusion de contenus amateurs ou envoyée par les utilisateurs. . Pour l’instant Joost dispose d’un catalogue de contenus libre de droits provenant de grands groupes comme Warner, Endemol ou encore Viacom (Paramount, MTV…) avec lesquels un partenariat a été signé.
Face à Joost on trouve donc Hulu, entreprise commune de News Corp et de NBC Universal qui bénéficie des contenus de ses actionnaires. Affichant une audience en croissance, suivie logiquement par des revenus publicitaires (selon le Financial Time, Hulu devrait générer 70 millions de dollars en 2008, contre 100 millions pour YouTube. L’an prochain devrait voir les deux sites au coude-a-coude avec 180 millions de dollars. Un dernier chiffre dans cette avalanche: Google avait cassé sa tirelire et dépensé 1,65 milliard de dollars pour acquérir YouTube. En face, NBC et News Corp (le groupe de Rupert Murdoch, qui possède notamment Fox), n’ont investi que 100 millions dans Hulu. Pas besoin d’être un expert comptable pour voir qui offre le meilleur retour sur investissement.)
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Hulu Le principe de Hulu est simple : proposer les séries et émissions à grande audience sur Internet le lendemain de leur diffusion à la TV. Hulu propose notamment des films comme Perdus dans l’espace, Borat, Little Miss Sunshine ou The Bourne Identity. Des séries à succès comme Prison Break ou Heroes sont également au programme. Le tout est financé par la publicité en ligne. Hulu est un donc un nouveau canal de diffusion pour des programmes conçus pour la tv, qu’on peut décider de regarder « à la demande et à son rythme »… Pas de temps de téléchargement comme avec iTunes, pas de paiement à effectuer, et un vaste choix parmi les séries. Et pour tout cela, les utilisateurs sont prêts à subir jusqu’à 5 publicités de 15 secondes par heure. Bien moins qu’avec la TV, qui en compte au minimum 5 fois plus sur la même durée. Adidas TV l’a d’ailleurs bien compris en construisant un « deal » avec ce nouveau canal de diffusion pour que la marque puisse diffuser ses contenus ailleurs que sur son site.
Dernière info en date, Hulu a annoncé qu’il était contraint de retirer ses contenus de Boxee, un logiciel open source qui transforme votre télé en media center du futur. Beaucoup voient une pression des câblo-opérateurs derrière cette décision. Avec un système comme Boxee, ces derniers deviennent dans un sens «irrelevant», hors-sujet, et leur offre, faite de packs de chaînes imposées, has-been. Wired exprime ce que tout le monde pense tout bas, «Voilà une preuve de plus que les groupes de télé vous haïssent. Ils montrent simplement à quel point ils sont stupides, désespérés de se raccrocher à un business model usé, vous imposant quand et où vous regardez la télé et leurs programmes.» Ils peuvent freiner tant qu’ils veulent. Mais que ce soit via Boxee ou d’autres, en passant par les accords Yahoo/Intel avec des fabricants pour intégrer des widgets au téléviseur, ou LG avec Youtube et NetFlix.
Dans une perspective similaire il existe Sling, initié par la compagnie Sling Media, qui offre aussi des films et séries TV en ligne. Là où Sling se différencie de ses deux principaux concurrents (Hulu et Joost), c’est en faisant le lien avec sa solution Slingbox pour regarder sa propre télévision à distance grâce à son lecteur Web «Sling.com’s Live TV».
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L’objectif de ce site est fournir des programmes audiovisuels sur PC mais également accessible sur la télévision à travers la Sling Box. La difficulté pour Sling sera d’accéder à des contenus car les majors se réservent le contrôle du transfert vers internet et, pour le moment, Sling se retrouve dans la situation de Joost qui peine à trouver des contenus.
Le portail vidéo Crackle, propriété de Sony Corp, poursuit enfin une stratégie différente: se démarquant des plates-formes permettant la mise en ligne de vidéos par des internautes et des webtv citées précédemment, Crackle tente de s’imposer comme un tremplin pour jeunes artistes. Cinéastes et autres artistes en herbe sont donc attendus sur cet espace. Cette filiale de Sony Pictures Entertainment, rachetée l’année dernière pour 65 millions de dollars, servira au géant japonais de véritable vivier de talents pour ses épisodes télévisés et autres productions du septième art.
Le site Web Crackle, servira donc, ni plus ni moins, comme une agence de talents émergents, et reliera les producteurs, auteurs et réalisateurs estampillés Sony Pictures. Si Crackle quitte le marché des plates-formes vidéo traditionnelles que sont YouTube, Google Vidéo ou Dailymotion, ce n’est pas tant à cause du fait qu’il soit littéralement dominé par les portails précités. C’est surtout parce qu’il va à l’encontre de ses intérêts. Et Josh Felser, fondateur et co-président de Grouper, de déclarer en 2007 : » Ce n’est pas une activité qui nous intéresse. (…) Le contenu est rarement exclusif et difficile à monétiser. Les publicitaires ne veulent pas que leurs contenus soient juxtaposés à des clips montrant quelqu’un qui saute d’un toit et qui tombe sur le crâne « .
Crackle ambitionne donc de devenir un Youtube sélectif, qui ne proposerait au public que les meilleurs contenus, en attirant au passage les meilleurs créatifs via la visibilité que peut offrir Sony. « Nous pouvons offrir le chemin vers Hollywood et vers la gloire », résume modestement Felser. Les réalisateurs qui postent des vidéos de qualité sur Crackle pourront intégrer les studios Sony Pictures, ou voir leurs oeuvres distribuées sur le Playstation Network, ou avec des produits comme les téléviseurs Bravia. Des concours sont organisés, qui n’offrent pas seulement de l’argent ou des cadeaux matériels, comme sur beaucoup d’autres sites, mais des cadeaux beaucoup plus personnels. Les gagnants de concours d’animation pourront ainsi visiter et peut-être intégrer les studios Sony Picture Imageworks et Sony Pictures Animation, par exemple.
» L’évolution de la vidéo en ligne apportera aux spectateurs davantage de contenus produits de manière beaucoup plus professionnelle « , a assuré Sean Carey, vice-président exécutif senior de Sony Pictures, relayé par Associated Press. » Nous ouvrons des passerelles vers Hollywood et la célébrité « , a renchéri Felser.
En France, enfin, citons Konbini, une nouvelle plateforme de divertissement interactive, comptant apporter une nouvelle proposition aux annonceurs au travers de la WebTV.: nouveau projet des très talentueux David Creuzot et Lucie Beudet (ex-La Chose), Konbini veut offrir aux15-35 ans plutot branchés et urbains des exclusivités sous la forme de programmes vidéo, mis à jour tous les mois, sur le basket, le rap (concert de NTM…), ainsi que quelques courts métrages. Pas mal de buzz dans la presse branchée, et presque un first-mover advantage, après les échecs des chaines web haut débit des années 2000…
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La société se présente comme une « plate-forme interactive de divertissement premium, légale et gratuite, qui propose des programmes exclusifs pour les 15/35 ans. » Son objectif : offrir un portail de contenus exclusifs vidéo et de qualité aux internautes, et se rémunérer en proposant aux marques de s’y associer.
Tous les contenus sur Konbini.com ne seront donc pas forcément brandés. Les marques viendront se greffer sur ceux qui peuvent leur correspondre, avec différents degrés possibles « d’endossement » : du simple sponsoring au placement de produit. Ce qui implique tout de même d’être en mesure d’intégrer les annonceurs en amont de la production. Et en effet, Konbini n’est pas seulement un média, la société porte aussi une casquette de co-producteur. « En fait, nous sommes à mi-chemin entre l’agent, le producteur exécutif et le studio, explique David Creuzot. Nous mettons en mouvement un nouvel écosystème. » A suivre donc.