Le Chili est en train de vivre un processus politique institutionnel historique, non seulement pour le pays, qui n’a jamais eu de Constitution écrite sous une démocratie, mais aussi au niveau international, puisque différentes lois constitutionnelles sont votées que très peu de Constitutions ont vu, voire aucune.
Ainsi, ce projet de Constitution s’attaque à des problèmes mondiaux, tels que la crise climatique, le racisme à l’égard des peuples indigènes, le centralisme des grandes villes, la maltraitance des animaux non humains et la violence à l’égard des femmes, les groupes de sexe et de genre dissidents et les personnes neurodivergentes.
Ce sont ces dernières, les neurodivergents, qui ont placé le Chili à l’avant-garde à l’échelle mondiale avec ce projet de Constitution, en donnant une reconnaissance officielle à des milliers de personnes qui ont été diagnostiquées comme ayant des problèmes de santé mentale et/ou comme ayant un handicap psychosocial ou un trouble du développement neurologique.
Ces personnes neurodivergentes ont non seulement dû subir la violence sous forme de stigmatisation, de discrimination, d’abus, de violations des droits de l’homme, d’enfermement forcé, de stérilisation forcée et même de torture, mais aussi la violence résultant des traitements psychiatriques (thérapie électroconvulsive) qu’elles reçoivent, qui continuent à envisager les questions de santé mentale selon un modèle rationaliste.
C’est pourquoi il est si important que la loi correspondante ne parle pas seulement de neurodivergents, mais aussi de neurodiversité, car elle brise le discours biomédical sur la normalité, car elle comprend qu’il existe un spectre plus large de la diversité humaine, montrant que les neurotypiques ne constituent qu’une partie de cette pluralité.
Par conséquent, ce qui est stipulé dans l’article 29 du projet de Constitution est extrêmement important, car il indique que « l’État reconnaît la neurodiversité et garantit aux neurodivergents leur droit à une vie autonome, à développer librement leur liberté et leur identité, en exerçant leur capacité juridique et les droits reconnus dans cette Constitution et dans les traités et pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme qui sont ratifiés et en vigueur au Chili« .
En d’autres termes, la nouvelle Constitution obligera l’État à reconnaître la neurodiversité et à garantir les conditions de développement de chacun, en laissant de côté la stigmatisation et les étiquettes psychiatriques qui ne cherchent qu’à nier les différences de vision et d’expérience du monde, pour laisser place à une vision inclusive des droits de l’homme.
En même temps, cette reconnaissance sans précédent de la neurodiversité dans le nouveau projet de Constitution chilienne n’est que le début d’un long processus de coexistence, qui n’est pas seulement lié à la santé mentale des personnes et à une vie autonome, mais aussi à la manière dont nous construisons une société sans idées préconçues ni stéréotypes, qui sont ancrés en nous dès le plus jeune âge.
Par conséquent, le rôle du nouveau système d’éducation nationale, également souligné dans le projet de Constitution, ainsi que celui des médias publics, sont essentiels pour promouvoir une vision qui considère la neurodiversité comme une richesse et non comme un problème, comme les groupes plus conservateurs ont tendance à le voir, étant donné leur peur de tout ce qui est différent et de l’approbation de ce type de lois.
Dans ce contexte, la défense de la neurodiversité est l’affaire de tous, et nous ne pouvons pas la déléguer à un organisme particulier, car il s’agit d’un sujet totalement transversal, ainsi que d’autres demandes présentées dans la nouvelle Constitution, comme la parité des sexes, le droit aux soins, le plurinationalisme, les droits de la nature et les animaux non humains en tant que sujets de droit.
Tout cela dit, il est impossible de ne pas mentionner le rôle que les citoyens organisés ont joué tout au long de ce processus constitutionnel et avant lui, où dans le domaine de la neurodiversité en particulier, le Mouvement national pour la défense de la santé mentale, a poussé cette discussion pendant des années, avec de nombreuses actions pour faire la lumière sur la question.
Enfin, il est important de citer des organisations individuelles dont font partie des personnes du secteur de la santé, des militants, des experts par expérience et des alliés de la neurodiversité, comme la Mesa Técnica del Movimiento Nacional de Defensa de la Salud Mental, Asociacion Autismo Arica, Centro Cultural Equidad y Género de Maule, Corporación ANUSSAM, Circulo Emancipador de Mujeres y Niñas con Discapacidad de Chile (CIMUNIDIS), Corporacion Voces, Observatorio de Derechos Humanos en Salud Mental Bío Bío et l’ONG Siendo.
Constitution au Chili : le projet final remis au président, référendum en septembre
Le Monde avec AFP – juillet 2022
Source : havanatimes.org Traduction de « Neurodiversity in Chile’s new Constitution«