RICHARD KERN

Des aisselles velues. Des sous-vêtements du quotidien. Des mises en scène improbables. Une lumière naturelle ou presque. Rien dans le travail de Richard Kern ne laisserait présager d’une carrière internationale de plusieurs décennies, de travaux exposés au MOMA et de collaborations régulières avec Vice et Purple.
Le photographe aura 60 ans l’année prochaine et continue de déshabiller les plus belles jeunes femmes du monde.
Un ovni qui trace son sillon, seul, et redéfinit les mots « sexy » et « beau ».

-Votre travail consiste à voyager au bout du monde et à prendre en photos de belles femmes nues. Diriez-vous que c’est le meilleur boulot du monde ?
Oui, surement. C’est étrange que ça fonctionne ainsi.

-Certains pensent que vous êtes un pervers, un malade. Qu’en pensez-vous ?
J’avoue que je suis malade, mais pas sexuellement. Je suis plus un maniaco-dépressif. Ensuite, je ne suis pas plus pervers que la moyenne des hommes, je l’assume plus, c’est tout.

-Vous avez un sens de l’esthétique totalement unique. À la fois fois réaliste et étrange. Comment le définiriez-vous ?
Je n’essaie pas de le définir autrement que la tentative de shooter des portraits et tenter d’y inclure quelques informations intéressantes.

-Aujourd’hui, le sexe est très pornographique. Votre approche aurait quelque chose de plus punk. Finalement, vous êtes d’une autre époque.
Oui, j’ai presque 60 ans et le porno comme sujet de travail ne m’intéresse vraiment pas. J’en regarde, mais ce n’est pas ce que je fais avec mes photos.

-Vous recevez beaucoup d’insultes de féministes pour votre travail avec Vice.
Les gens pensent que je camouflent du porno en art et ils le comparent à ce qu’ils voient sur internet, avec un sexe omniprésent. Ils regardent Vice comme un magazine mainstream et écrivent leurs commentaires dans ce contexte. Et je ne peux pas leur donner tout le temps tort.

-Si je vous dis que pour moi, les filles que vous prenez en photos sont belles, mais pas sexy, comment le prenez-vous ?
Je dis que vous avez parfaitement perçu mes photos.

-Pour moi, votre travail traite du charme, de l’attraction et surtout de comment la nudité n’implique pas forcément le charme.
Merci.

-J’adore la façon dont vous dirigez les filles. Est-ce naturel ou préparez-vous l’atmosphère largement en amont ? Parce que, pour travailler avec vous, elles doivent réellement se laisser aller.
J’ai, normalement, une liste des shoots que je veux faire et je me base sur le lieu et sur ce que doit faire le modèle.

-Finalement, les filles ont toujours l’air innocentes. Vous êtes peut-être le Nobokov de la photo. Entre Nobokov et Bukowsky disons.
Et pourquoi pas Polanski et Godard ? Vous avez choisi deux écrivains dont je ne suis pas fan. Mais je respecte leur travail.

-On rapproche souvent vos photos à celle de Terry Richardson. Vous sentez-vous proche de son travail ?
Terry est un photographe incroyable. Si vous voyez l’une de ses photos, vous n’avez pas besoin de lire les crédits, vous savez que c’est de lui. Créer une telle identité est particulièrement difficile à atteindre. Il a créé un style totalement nouveau. Je sais que ça peut sembler être des conneries, mais c’est vrai, la preuve c’est que des douzaines de photographes le copient. La qualité de ses photos varie selon les sujets, et les goûts sont subjectifs. Je respecte énormément ce qu’il fait dans son travail personnel. Son travail commercial ne m’intéresse pas, mais je ne suis pas sa cible.

-Quelles sont vos références artistiques ?
Antonioni, Chris Burden, Jean Seberg, Russ Myer, The Sex Pistols, Black Flag, Suede, David Bowie, Beatrice Romand, Duncan Hannah, Cosy Fanni Tutti, Rita Ackermann, Kim Gordon, la drogue, les livres, le ciné, les clips, les femmes dans la rue, etc.