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La « covidenticopathie », nouvelle pathologie mentale contemporaine

La « covidenticopathie », nouvelle pathologie mentale contemporaine

Le point de départ de cette réflexion est personnel. Comme beaucoup d’entre nous, depuis quelque temps, j’ai été très surprise par les changements radicaux de comportement de certaines personnes, que ce soit dans le domaine privé ou public. En toile de fond, des comportements banalement violents, lesquels m’ont poussée à m’intéresser à cette contagion délétère et à structurer cette réflexion par l’écriture. Tout d’abord, un scientifique d’une intelligence remarquable avait en 2020 exposé avec brio le danger du totalitarisme et ses conséquences dramatiques…puis en 2021 a prétendu que « l’on n’avait pas le droit de tuer ses parents » en s’adressant aux personnes réfractaires au chemin tout tracé par le système. Très choquée par cette intervention du fait de mon admiration pour sa grandeur d’âme et sa finesse intellectuelle, j’ai commencé à gamberger. Et d’autres surprises du même acabit ont suivi.

En effet, une nouvelle maladie mentale a vu le jour et s’est propagée de manière fulgurante depuis 2021. La covidenticopathie sera probablement inscrite au prochain DSM -le VIDAL des psys- !! Une petite note humoristique ne fait pas de mal en pleine dystopie !

Bien que nouveauté, elle présente déjà des caractéristiques majeures, repérables surtout dans les interactions humaines. Parmi ces caractéristiques, nous retrouvons une perte de bon sens, de discernement, d’empathie, d’humanité, chez des personnes qui, jusque-là n’en manquaient pas. Bien au contraire, les personnes qui applaudissaient les soignants en 2020 ou se préoccupaient de venir en aide à leur voisine seule et âgée sont particulièrement touchées aujourd’hui par cette nouvelle maladie mentale. Cela s’appelait la solidarité. Aujourd’hui l’irrationalité. Comme si leur humanité avait été détournée en quelques mois au profit d’une nouvelle dimension humaine que l’on pourrait qualifier de « trans(e) humanité ». Les symptômes psychiques majeurs sont la peur de l’étranger, la mise à distance de tout contact tactile, la distorsion de la réalité, la discrimination massive de tous ceux qui ne sont pas à l’identique*, soit « les non-identiques ». Beaucoup penseront aux mécanismes de l’emprise qui conduisent à perdre progressivement son esprit critique, et par là même sa propre conscience éclairée. Or, cette nouvelle pathologie a ceci de particulier que les personnes qui sont touchées n’appartiennent à aucune secte ou ne sont pas victimes d’un conjoint ou d’un employeur pervers. En fait, cette maladie mentale n’est pas individuelle mais collective. Il suffit qu’un élément du groupe soit différent de l’ensemble pour qu’un conglomérat se forme aussitôt à l’encontre du « cygne noir ». Si ce cygne n’est pas convaincu de rejoindre la pensée majoritaire, ou pire, s’il se rebiffe, les symptômes psychiques aigüs apparaissent, laissant place à une agressivité débridée jusqu’à, parfois, l’exclusion de cet étranger qui fait peur. Lorsque le cercle familial est atteint, les dégâts collatéraux sont désastreux. Des enfants refusent de voir leurs parents, des fratries se divisent, des proches sont bannis…dans une atmosphère de violence banalisée.

Actuellement, divers scientifiques parlent du phénomène de masse de « transe hypnotique » qui génère des états de conscience modifiée. N’étant pas moi-même hypnothérapeute, je ne m’étendrai pas sur le sujet. Mon propos cherche à se recentrer sur les personnes qui présentent cette forme atypique « d’inversion de leur personnalité.» Celles qui ont vraiment perdu leur boussole interne et qui se comportent comme des automates ralliés par un refrain commun autour de la peur, celui qui tourne en boucle depuis deux ans. En observant ce qu’il se passe autour de nous, la complexité est grande. Car cette nouvelle maladie ne semble pas concerner tous ceux qui sont le plus effrayés. Ceux-là même, dans l’hébétude, ont tendance à l’isolement afin de se protéger ou de protéger leurs proches coûte que coûte. Le plus souvent, pris par une forme d’hypocondrie massive, ils ne déploient aucune hostilité à l’égard des non-identiques.

En revanche, les personnes qui présentent les symptômes les plus aigüs sont celles qui ont créé la stupéfaction. Bien qu’il n’y ait pas de profil type, nous avons tous été surpris -voire meurtris- par les nouveaux comportements de proches, autrefois sensés, intelligents, instruits, compatissants, ou de scientifiques adulés jusque-là, ayant perdu tout sens critique et toute rationalité. Paradoxalement, je remarque que ce sont ceux qui étaient le plus modérés ou inhibés qui ont aujourd’hui les comportements les plus outranciers. Ce qui exacerbe d’autant plus mon questionnement.

La question qui s’impose à moi dans ce fil de réflexion est : qu’est-ce qui fait que cette inversion se soit opérée progressivement mais rapidement entre 2020 et 2021 ? S’agit-il d’un processus de transe hypnotique qui a gagné du terrain peu à peu jusqu’à l’achèvement réussi de la modification de conscience ? Et qu’est-ce qui fait que la réussite est totale chez certains et partielle chez d’autres ?

A cet égard, je m’interroge sur la question de la résilience. Intervient-elle dans ce processus abouti ? À savoir, les personnes qui ont vécu des blessures, et plus particulièrement celles qui ont subi des stress post traumatiques, sont-elles plus aptes à développer cette nouvelle maladie ? Nous pourrions penser que les personnes résilientes soient moins sujettes à la covidenticopathie car elles ont développé des mécanismes de résistance psychique, notamment une résistance à la manipulation. Par contre, celles qui ont subi des traumas et dont la résilience a échoué au cours de leur vie seraient plus vulnérables à cette nouvelle maladie. Tel est le fruit de ma réflexion aujourd’hui.

Un autre axe m’interpelle, celui de la phobie. J’ai toujours été intriguée par l’intérêt premier que l’on accordait à l’objet phobique. Les thérapies comportementales et cognitives sont à même de traiter sous cet angle. En ce qui me concerne, je l’aborderai sous un angle systémique. Ayant réalisé mon travail de recherche psychopathologique sur la dimension phobique, je me permets de vous livrer mes hypothèses. Sachant que le plus important, à mon sens, pour comprendre ces mécanismes est de s’intéresser à la fonction de la phobie. A quoi sert-elle ? Principalement à contenir une angoisse massive à travers une peur circonscrite projetée sur un objet particulier. Si l’on ne se préoccupe que de la peur et de l’évitement phobique, tels que la peur de la maladie, de la mort, nous passons à côté de la compréhension profonde de son utilité. Lorsqu’un patient vient consulter pour une phobie, le plus souvent invalidante, je l’interpelle toujours sur l’utilité qu’elle peut avoir dans sa vie psychique. De quoi cette phobie le protège t-il ? Cet angle de vue modifie souvent sa manière de l’appréhender, de la gérer, jusqu’à la voir disparaître si elle n’a plus d’utilité. En attendant, c’est bien plus rassurant pour ce patient de découvrir que sa phobie le protège d’une angoisse plus profonde…elle a alors toute sa place. Et finalement, la peur des araignées peut devenir une protection très efficace contre un mal sourd, profond et diffus. J’ai remarqué que, tant que la fonction phobique n’est pas mise en évidence, la phobie se déplace, au même titre qu’un symptôme somatique. La personne n’a plus peur de prendre l’avion mais a peur de traverser un tunnel.

Pour replacer cet angle de vue dans le contexte actuel de l’apparition de la covidenticopathie, l’objet phobique primaire, début 2020, était simple : la peur de mourir ou de perdre un proche fédérait l’ensemble de la population, du moins dans l’inconscient collectif. Nous étions tous identiques face à la pénurie de masques, de gel hydroalcoolique, face au confinement et aux mesures coercitives…et l’objet contraphobique par excellence était incarné par le symbole « des soignants, nos héros » qui allaient nous sauver de cette phobie galopante. Certains imaginaient même naïvement un monde sans phobie « le monde d’après ».

Or, le monde d’après, qui a vu le jour en 2021, était tout autre. Un clivage binaire s’est rapidement installé au sein de la population entre d’un côté, les bons, « les identiques », de l’autre, les mauvais, « les non-identiques ». Rétrospectivement, ce fut un tour de passe passe très réussi. Kaa, le serpent du Livre de la jungle, n’aurait pas fait mieux. Ceux qui ont regardé dans sa direction se sont laissés envoûter vite fait bien fait. Ceux qui ont résisté au « aie confiance » ne se sont certes pas endormis mais sont devenus l’objet phobique numéro 1 à combattre. Un transfert de haut vol. Inédit. Passer d’un objet phobique à un sujet phobique n’est pas rien et fait changer radicalement de paradigme. Combattre une épidémie en associant toutes les compétences humaines de manière appropriée et consensuelle n’a rien à voir évidemment avec le combat mené contre une partie de la population qui assume son désaccord et sa différence. D’autant que la peur de la mort est de fait consensuelle. Alors que la peur de l’humain devenu étranger génère tout autre effet. Qu’est-ce qui en a résulté ? L’apparition de ces nouveaux troubles psychiques qui continuent à altérer fortement la qualité des relations humaines.

Si nous revenons sur la fonction phobique, de quoi se protégeraient les personnes qui sont atteintes de covidenticopathie ? D’une angoisse abyssale existentielle où l’Etranger constituerait la part sombre de soi-même à combattre ? L’objet contraphobique deviendrait l’appartenance au jeu social, l’acceptation de toute conformité, même si celle-ci suit la logique de l’absurde.

Ainsi, être en règle avec la société serait le meilleur évitement phobique. Et nous pourrions ajouter que c’est toute l’hostilité du monde qui se joue contre celui qui pense différemment et se comporte de manière non conformiste.

Ce n’est pas sans rappeler le contexte historique de « L’étranger » de Camus, publié en 1942, où est mise en évidence l’absurdité de tout un monde divisé. L’épilogue nous le confirme :

« Devant cette nuit chargée de signes et d’étoiles, je m’ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde…Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu’il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu’ils m’accueillent avec des cris de haine. »

80 ans après la publication de Camus, puissions-nous cheminer vers une issue salutaire pour un monde devenu fou « sacrifiant sur l’étal de ses certitudes celui qui, parce qu’il ne sait pas mentir, ne leur ressemble pas. » Et revenir, dans ce processus de guérison, à l’article premier de la Déclaration universelle des droits de l’homme : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. »

Une psy non-identique.

*Définition d’identique : tout à fait semblable, mais distinct


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