La Ve République vacille, et l’Élysée tremble. Pavel Durov, le sulfureux patron de Telegram, a décidé de jouer les pyromanes dans le pré carré de la Macronie, et il ne fait pas dans la dentelle.
Le procès de Sean "Diddy" Combs, qui secoue New York en ce mois de mai 2025, est une plongée dans l’horreur, révélant un prédateur qui a bâti un empire de terreur et d’abus sexuels derrière les strass et les projecteurs.
En ce 24 mai 2025, nous nous tenons à un carrefour critique de l’histoire de la France. Les récentes révélations sur l’influence de la Franc-Maçonnerie dans l’État et la justice, culminant avec l’affaire de la loge Athanor, nous contraignent à une prise de conscience collective.
Avant-ProposNous vivons une époque de changements sans précédent et nous avons plus que jamais la responsabilité et le potentiel de bâtir ensemble un avenir meilleur. Cette période de bouleversements inédits, marquée par des défis économiques, environnementaux, géopolitiques, sociétaux et technologiques majeurs qui coïncident et s’amplifient les uns les autres, exige des actions elles aussi inédites. Fondé sur la conviction que nous avons à la fois la responsabilité et le potentiel de répondre à ces questions, Le Grand récit est un appel à l’action collective et individuelle. La réflexion qui sous-tend ce livre s’inspire d’une conviction profonde: si nous voulons assurer un avenir meilleur à l’humanité, le monde doit devenir plus résilient, plus équitable et plus durable. Dans COVID-19: la Grande réinitialisation, publié en juillet 2020, nous avons levé le voile sur ces questions. Le Grand récit met en avant une série de solutions possibles. L’épilogue de notre saga humaine dépendra du récit prédominant. Pourquoi les récits sont-ils importants? En tant qu’êtres humains et animaux sociaux, nous sommes des conteurs d’histoires, et les histoires que nous racontons (les récits) sont notre outil fonda-mental de communication et de transmission. Les récits sont notre façon de donner un sens à la vie; ils nous fournissent un contexte, grâce auquel nous pouvons mieux interpréter et comprendre les faits que nous observons, pour ensuite y réagir. Plus important encore, les récits percutants ont le pouvoir de nous inciter à l’action. Mais pourquoi un seul «grand récit»? Parce que la constellation d’histoires importantes en corrélation que propose ce livre s’articule autour d’une histoire centrale. Vous y trouverez un large éventail de questions visant à faire la lumière sur ce qui se prépare et à offrir une certaine clarté sur les réponses collectives envisageables. Toutefois, Le Grand récit propose un cadre pour l’action future, et non une prescription. Le Grand récit exprime nos convictions personnelles sur la meilleure façon d’avancer. Les problèmes auxquels nous sommes collectivement confrontés sont considérables, nous en sommes conscients; mais nous croyons également que des solutions existent et sont à notre portée. En ce sens, il s’agit d’un livre plein d’espoir qui rejette catégoriquement la vision apocalyptique condamnant l’humanité à sombrer dans l’oubli. La créativité, l’ingéniosité et la sociabilité innée de l’être humain sont bien trop puissantes pour cela et peuvent l’emporter. Nos opinions et nos convictions sont fondées sur nos valeurs humanistes: ce livre est fondé sur des preuves et s’appuie sur la science. Il est également étayé par 50 conversations ayant eu lieu avec d’éminents penseurs et leaders d’opinion mondiaux représentant des disciplines universitaires et points de vue divers. Certains ont corroboré nos convictions. D’autres les ont remises en question. Tous ont enrichi notre réflexion. Et nous leur en sommes reconnaissants. 15 décembre 2021 Klaus Schwab – Thierry Malleret
1. IntroductionQuel avenir nous attend? Quel avenir voulons-nous? Que devons-nous faire pour y arriver? Nous sommes tous préoccupés par ces trois questions. Le Grand récit apporte une réponse aux deux premières et prépare le terrain pour aborder la troisième. Nous ne pouvons pas prédire l’avenir. Cependant, nous pouvons l’imaginer et même le concevoir; aucune issue n’est prédéterminée et, en tant qu’êtres humains cognitifs, il nous est encore possible de façonner le monde que nous voulons. Plus important encore, nous pouvons aussi nous préparer à l’avenir, en affrontant à la fois les risques qu’il est possible d’atténuer et les choses qui nous surprendront. La pandémie était l’une de ces choses. Nombreuses sont les organisations internationales et les personnes qui avaient prévenu depuis des années qu’une pandémie se produirait, mais, malgré cela, cette dernière a pris la plupart du monde par surprise. Aujourd’hui (en décembre 2021), près de deux ans après le début de la pandémie, celle-ci semble interminable et continue de s’éterniser. Nous espérons que la crise de COVID-19 sera bientôt terminée, mais est-ce le cas? «Toute épidémie connaît un début et une fin», comme nous l’a dit une ancienne directrice générale de l’Organisation mondiale de la santé1, mais les pandémies, en tant que phénomène social et psychologique, ne sont pas épisodiques: elles durent des années. Un historien des sciences et de la médecine l’exprime ainsi: «Nous traversons l’ère de la COVID-19, et non la crise de COVID-19. Il y aura beaucoup de changements substantiels et persistants. Quand nous regarderons en arrière, nous ne nous dirons pas: “C’était une période terrible, mais c’est fini.” Nous devrons faire face à de nombreuses ramifications de la COVID-19 pendant des décennies.»2 En effet! Les leçons tirées des pandémies passées nous montrent combien il est difficile de comprendre comment, quand et pourquoi elles se terminent, et quels sont leurs effets à grande échelle. Tout au long de l’histoire, lorsque la maladie physique, mesurée en taux de mortalité ou d’infection, s’est atténuée, l’impact de la pandémie s’est prolongé. La pandémie continue d’affecter nos vies, à mesure que les économies et les sociétés s’adaptent progressivement et que les individus s’efforcent de retrouver un semblant de normalité. Le choc psychologique provoqué par les différentes formes de peur déclenchées par la maladie, comme la peur de tomber malade, la peur de l’isolement, la peur des «autres» ou même la peur de «l’avenir», met beaucoup plus de temps à se dissiper. Il est d’ores et déjà évident que la crise de COVID-19 a déclenché des changements considérables qui se dérouleront de diverses manières. Certains de ces changements étaient déjà visibles avant la crise, mais la pandémie les a accélérés (voire «exacerbés», comme l’affirment certains experts). Parmi ceux-ci figurent l’accélération de l’automatisation et de l’innovation, la montée des inégalités, le pouvoir croissant de la technologie et de la surveillance, l’augmentation de la rivalité entre les États-Unis et la Chine, le retrait partiel de la mondialisation, le changement de paradigme économique et un paysage géopolitique de plus en plus fracturé. Mais d’autres changements en perspective dépassent la simple accélération des tendances préexistantes, dont une poignée qui auraient semblé inconcevables avant l’apparition de la COVID-19: le réexamen de nos priorités sociales (tel qu’exprimé notamment dans le phénomène de la «Grande démission»), des mesures plus radicales en matière de bien-être et de fiscalité, de nouvelles formes d’intervention de l’État, l’attrait croissant des politiques en matière de bien-être et un nouvel intérêt pour la nature. Ce ne sont là que quelques exemples de nouveaux changements systémiques qui gagneront en pertinence. Au cours des derniers millénaires, les pandémies ont représenté la règle, et non l’exception. Dans ces conditions, comment l’histoire peut-elle nous aider à comprendre ce qui nous attend? Les pandémies sont par nature un choc qui divise et traumatise. En tant que telles, elles tendent à exacerber les mêmes questions et problèmes majeurs qui se sont répétés tout au long de l’histoire de l’humanité: guerres et conflits, inégalités et appauvrissement, cohésion et conflits sociaux, turbulences politiques, perturbation de l’offre et de la demande, surendettement, pour ne citer que quelques exemples notables. Toutefois, en raison de leur nature fondamentalement perturbatrice, les pandémies peuvent également s’avérer être une force de changement durable et souvent radicale. La COVID-19 ne fait pas exception. Elle a révélé, au sens photographique du terme, deux choses: (1) les principales failles divisant le monde actuel, comme les fractures sociales, le manque d’équité, la coopération limitée, l’échec de la gouvernance mondiale, les troubles géopolitiques; mais aussi (2) notre extraordinaire capacité à nous mobiliser et à innover lorsque nous sommes confrontés à des épreuves aussi intenses. Qui aurait pu prédire, aux premiers jours de la pandémie, qu’un si grand nombre de gouvernements et de banques centrales viendraient au secours des sociétés et des économies de leurs pays avec des politiques fiscales et monétaires aussi incroyablement accommodantes? Qui aurait pu imaginer au printemps 2020 que non pas un, mais plusieurs vaccins seraient disponibles moins d’un an plus tard? Un nouveau monde (et non une «nouvelle normalité») est en train d’émerger. Ses contours seront largement définis par les récits qui évolueront pour informer et construire la voie à suivre. Tout au long de l’histoire de l’humanité, cela a été une caractéristique essentielle des pandémies. En constituant une menace existentielle, elles nous obligent à nous poser de grandes questions, non seulement sur nous-mêmes, notre vie et notre propre mortalité, mais aussi sur les autres. Les pandémies sont comme un grand miroir brandi devant nos «visages» collectifs, qui nous renvoie le reflet de ce que nous sommes vraiment, en tant qu’individus et en tant que sociétés. C’est pourquoi, comme toutes les crises profondes, elles nous obligent à repenser le contrat social qui nous lie et la façon dont nous faisons les choses, ce qui peut à son tour déclencher l’innovation et ouvrir la voie à des ruptures institutionnelles, politiques et sociétales. Les chocs importants (tels que celui infligé par la pandémie) peuvent engendrer des changements considérables, et faire face à l’adversité par la seule force de l’ingéniosité a toujours fait partie de notre condition humaine. Pourquoi les choses seraient-elles différentes cette fois? Elles ne le seront pas, mais deux caractéristiques spécifiques du monde actuel rendront les changements à venir plus brusques, plus compliqués et plus profonds que nous ne l’imaginons.1.1. Concaténation des risques et connectivité systémiqueL’interdépendance, sous-produit du progrès technologique et de la mondialisation, est la caractéristique déterminante du 21e siècle. Cela signifie que nous vivons aujourd’hui à l’aube de changements conséquents majeurs qui ne sont pas indépendants les uns des autres, mais se produisent simultanément et dont les risques sont concaténés (c’est-à-dire liés entre eux), se renforçant mutuellement par des effets domino et des phénomènes de contagion3. La pandémie est survenue à un moment très particulier où nos économies et nos sociétés semblent mal adaptées à bon nombre des défis à venir, où les paysages géopolitiques et technologiques sont en train d’être remodelés d’une manière qui les rendra méconnaissables dans quelques années à peine, et où l’environnement est au bord de la catastrophe en raison de la menace existentielle que représente le changement climatique. La conjonction de tous ces défis, qui surviennent simultanément et ont une influence les uns sur les autres, définit la «connectivité systémique» et rend notre époque unique dans l’histoire: non seulement tous les changements se produisent en même temps, mais ils sont également exacerbés par la pandémie, et ce à vitesse grand V. Comme nous le verrons, les solutions aux grands défis auxquels nous sommes confrontés existent et sont à portée de main, mais elles exigeront beaucoup d’innovation et des changements radicaux dans nos économies et nos sociétés, ainsi que dans les institutions, les lois et les règles qui les régissent. Nos habitudes de vie et nos modes de consommation devront également changer considérablement. 1.2. Les médias sociaux et l’ère des fake news Les mensonges, les fausses informations, la désinformation et les conspirations ont toujours existé, mais aujourd’hui, elles sont servies et amplifiées par la domination et la portée des médias sociaux, ainsi que par la viralité des fake news. En outre, la manière dont les médias sociaux structurent désormais la communication entre les individus peut affecter la capacité collective de certains groupes à former des croyances fiables. Cela se manifeste de deux manières. (1) Nous pouvons choisir, comme nous le faisons si souvent sur les médias sociaux, de n’interagir qu’avec les personnes qui partagent nos croyances et refuser toute interaction avec celles qui les remettent en question. Ainsi, en nous connectant uniquement à ceux qui partagent nos points de vue, nous renonçons à une véritable connectivité et fermons les canaux de communication vitaux, ce qui crée des divisions et une polarisation. (2) Toutes sortes d’influenceurs, qu’il s’agisse d’agences gouvernementales, de groupes industriels ou même d’individus, ont désormais un accès direct à de grands groupes de personnes «prêts à mobiliser» avec lesquels ils peuvent créer une relation de confiance et de dépendance, et ainsi aggraver, voire enflammer, la polarisation. Il n’est pas surprenant que les recherches menées pendant la pandémie aient mis en évidence un lien entre l’incertitude et l’anxiété liées à la COVID-19 et une plus grande susceptibilité d’adhérer à des théories du complot4. Cela explique en partie pourquoi de puissants mouvements anti-science prolongent le déclin de la pandémie de COVID-19, entravant à la fois la santé publique et, plus fondamentalement, notre capacité à avancer à l’unisson. Au-delà des limites de la pandémie, l’abondance des fake news et leur capacité à amplifier et manipuler la polarisation entravent notre capacité à traiter correctement les problèmes d’action collective considérables auxquels l’humanité est confrontée. Dans ce contexte, comment comprendre au mieux la nécessité et la pertinence des changements à venir, la manière dont nous pouvons influencer leur trajectoire, et le rôle que jouent la connectivité systémique, les médias sociaux et les fake news dans tout cela? Il est difficile de donner une simple réponse à cette question. Il nous faut d’abord répondre à des questions telles que: que ferons-nous ensuite? Quels choix voulons-nous faire? Comment réparer ce qui ne fonctionne pas? Comment mettre en place les nouvelles politiques et solutions correspondantes? Comment saisir les idées qui les sous-tendent? Comment rendre ces idées acceptables pour qu’une grande majorité de citoyens y adhèrent? L’ampleur de la tâche donne le tournis! Sa complexité dépasse de loin les capacités cognitives d’un seul individu ou la compréhension collective d’une seule discipline universitaire et/ou pratique professionnelle. Et ce, pour une simple raison: les universitaires et autres professionnels ont tendance à exceller dans la réflexion propre à un domaine étroit et, pour ce faire, à s’appuyer sur un cadre conceptuel et méthodologique particulier, ce qui leur laisse peu ou pas de temps pour se connecter à d’autres disciplines ou professions. Cela peut se traduire, et c’est souvent le cas, par une inquiétude partagée d’être dépassé par la complexité de la tâche et d’avoir une compréhension limitée de sa portée. Prenons l’exemple de la concaténation entre les questions économiques, géopolitiques, sociétales, technologiques et environnementales. Outre les limitations cognitives évidentes qu’une surcharge d’informations et une complexité croissante nous imposent, nous sommes tous limités dans notre compréhension des choses par les frontières de notre vie professionnelle. Si nous sommes économistes, nous nous spécialisons dans l’économie et avons du mal à comprendre ce qui se passe dans d’autres domaines, comme la géopolitique, la technologie ou l’environnement. Si nous sommes un spécialiste de l’intelligence artificielle (IA), il peut être difficile pour nous de comprendre ce qui se passe dans le domaine des sciences sociales et dans quelle mesure la culture et les normes sociales dictent comment ou si les sociétés vont «adopter» de nouvelles technologies et s’y adapter. Et ainsi de suite. En résumé, nous avons tous tendance à fonctionner en vase clos et parvenons rarement à faire les connexions indispensables entre des domaines disparates. Par conséquent, notre façon de réagir à de nouveaux faits ou situations et de donner un sens au monde dépend largement de celle des personnes que nous connaissons ou en qui nous avons confiance, et est finalement façonnée sur le même modèle. Ce processus fondamental d’échange, de compréhension et d’évaluation se déroule par le biais d’histoires, ou de récits. 1.3. Le pouvoir du récit En tant que vecteurs d’idées les plus efficaces, les récits ont le pouvoir unique de nous aider à déterminer ce qui se passe, ce qui nous attend et ce qui doit être fait, d’où le titre de ce livre. Défini dans les termes les plus simples possibles, un récit est une histoire à propos de quelque chose. De manière plus appropriée pour l’objectif du Grand récit, c’est aussi «une manière de présenter ou de comprendre une situation ou une série d’événements qui reflète et promeut un point de vue particulier ou un ensemble de valeurs»5. Certaines des personnes que nous avons interrogées pour ce livre vont plus loin, comme John Hagel, qui établit une distinction entre les histoires et les récits: «Les histoires sont autonomes, elles ont un début, un milieu et une fin (…). Les récits sont infinis. Ils n’ont pas encore de conclusion. L’avenir est fait d’une sorte de grande menace ou opportunité, et savoir si celle-ci sera traitée reste flou. La conclusion du récit dépend de vous, les personnes auxquelles le récit s’adresse. Vos choix et vos actions aideront à déterminer comment le récit se déroule.»6 Les histoires sont essentielles pour nous, car en tant qu’êtres humains et animaux sociaux, nous sommes des conteurs d’histoires. Le philosophe Jean-Paul Sartre l’a dit dans La nausée (1938): «Un homme, c’est toujours un conteur d’histoires, il vit entouré de ses histoires et des histoires d’autrui, il voit tout ce qui lui arrive à travers elles; et il cherche à vivre sa vie comme s’il la racontait.» Robert Shiller, le «père» de la Narrative Economics, va encore plus loin en établissant un lien entre les récits et les décisions que nous prenons: «Le cerveau humain a toujours été très porté sur les récits, qu’ils soient factuels ou non, pour justifier les actions en cours.»7 La riche littérature scientifique sur les récits montre clairement que nous pensons, agissons et communiquons en termes de récits, et que chaque interprétation, compréhension ou modèle de fonctionnement du monde commence par une histoire. Les récits fournissent le contexte dans lequel les faits que nous observons peuvent être interprétés, compris et exploités. En ce sens, ils représentent bien plus que les histoires que nous racontons, écrivons ou illustrons au sens figuré; ils finissent par être les vérités, ou les idées que nous acceptons comme telles, qui sous-tendent les perceptions façonnant nos «réalités» et, ce faisant, formant nos cultures et nos sociétés. Grâce aux récits, nous expliquons comment nous voyons les choses, comment elles fonctionnent, comment nous prenons des décisions et les justifions, comment nous comprenons notre place dans le monde et comment nous essayons de persuader les autres d’adhérer à nos croyances et à nos valeurs8. En résumé, les récits façonnent nos perceptions, qui à leur tour forment nos réalités et finissent par influencer nos choix et nos actions. C’est ainsi que nous trouvons un sens à la vie. Ce livre propose une constellation de récits interdépendants qui mettent en lumière ce qui nous attend et comment réagir. Le Grand récit s’articule autour d’une histoire centrale et résulte d’un effort de collaboration avec certains des plus grands penseurs du monde. Il vise à façonner des perspectives à plus long terme et à co-créer un récit capable d’aider à créer une vision plus résiliente, inclusive et durable de notre avenir collectif. Ce livre s’appuie en grande partie, mais pas exclusivement, sur des entretiens menés auprès de 50 penseurs et leaders d’opinion parmi les plus éminents au monde, issus d’un large éventail de disciplines universitaires, ainsi que de régions géographiques et de milieux différents. Des milliers et des milliers d’universitaires, de chercheurs, de scientifiques, de professeurs, d’experts en prévisions et d’écrivains influents auraient pu figurer sur cette liste. Le choix de ces 50 personnes fut donc relativement arbitraire. Nous sommes toutefois convaincus de la légitimité de ces personnes dans le sens où elles laisseront toutes une empreinte dans leur domaine d’expertise (et souvent au-delà) et tendent à être écoutées par des personnes extérieures à leur domaine. En bref, leurs récits ont une influence, ils comptent vraiment. Que nous soyons d’accord ou non avec eux, ces récits titillent notre imagination et nous incitent à flirter avec les idées qu’ils présentent, voire à y adhérer. C’est essentiel. Trop souvent, nous avons tendance à privilégier des idées bien établies, profondément imbriquées et influencées par notre vie personnelle et professionnelle. En d’autres termes, nous ne pensons pas assez «hors des sentiers battus». En conséquence, nous limitons notre exposition à ces autres idées qui pourraient nous surprendre ou nous inspirer et nous obliger à penser un peu différemment, à remettre en question certaines de nos croyances et suppositions et à établir de nouvelles connexions mentales. Lorsque vous lirez ce livre, nous espérons que vous vous rendrez compte que les 50 récits peuvent nous aider à voir les choses différemment et à développer notre carte mentale sur ce qui doit être fait pour rendre le monde meilleur. C’est ce que fait chaque récit, avec sa propre perspective et par la simple vertu de la diversité cognitive. Chacun nous expose aux idées influentes d’autres personnes. Réunis, ils forment une toile intéressante: une grande série de récits dans lesquels nous pouvons nous engager pour façonner la société et l’économie que nous voulons. L’objectif de ce livre est d’exposer les idées qui se cachent dans les divers récits et d’en discuter. Notre ambition est également de les faire progresser dans les domaines de la prise de décision et de la politique. Les actions, les solutions et les politiques commencent toujours par une «grande» idée. Les grandes idées ne font pas seulement tourner nos économies (elles sont le véritable moteur de la croissance économique), elles font aussi tourner le monde. Lorsqu’une grande idée fait son chemin et devient influente, elle peut se transformer en récit viral: elle prend son envol et devient contagieuse, faisant son chemin dans les politiques ainsi que dans les décisions des entreprises et des investisseurs. Grâce au travail acharné et à l’imagination de ceux qui en sont à l’origine, les idées stimulent la créativité et deviennent le fondement de la découverte, de l’innovation et du changement. Elles peuvent également devenir un appel à l’action. Si les idées devaient être considérées comme un bien économique, les économistes les appelleraient dans leur jargon un bien «non excluable» et «non rival». Si les idées sont non excluables, c’est parce qu’elles sont libres par nature: personne ne peut effectivement être exclu de la consommation (ou de la génération) d’une idée. Les idées sont également non rivales, car elles peuvent être utilisées par quelqu’un sans réduire leur disponibilité pour les autres: tout le monde peut «consommer» une idée sans empêcher les autres de le faire. Comme le dit le proverbe: «Si tu as une pomme, que j’ai une pomme, et que l’on échange nos pommes, nous aurons chacun une pomme. Mais si tu as une idée, que j’ai une idée et que l’on échange nos idées, nous aurons chacun deux idées.» Cette caractéristique spécifique des idées leur confère «la propriété naturelle de générer des rendements d’échelle non décroissants»9. Pour faire simple: plus il y en a, mieux c’est, et plus on a d’idées, plus il y en aura d’autres! Le Grand récit offre une profusion d’idées intéressantes et parfois intrigantes, tirées des entretiens que nous avons menés avec 50 penseurs et leaders d’opinion mondiaux. Ce livre traite des idées et de la façon dont elles peuvent s’unir pour former un Grand récit. Il s’agit aussi, et surtout, de la façon dont certaines de ces idées peuvent ou doivent faire leur chemin dans les politiques et les prises de décisions. Je le répète: elles dépassent le cadre de la théorie et constituent un appel à l’action. Nous sommes d’avis qu’en se remettant de la pandémie et en s’engageant sur la voie d’un changement radical et accéléré, nos sociétés et nos économies devraient être plus inclusives et en phase avec les besoins de notre patrimoine commun, mais aussi plus résilientes. Le Grand récit est un hybride entre un essai, un manifeste et un précis universitaire succinct. Il aborde un tel éventail de sujets qu’il est par nécessité très synthétique (la synthèse est un processus de simplification, mais il va sans dire qu’être simple ne signifie pas être simpliste). Certaines idées et certains récits présentés dans ce livre peuvent s’éloigner légèrement de l’opinion majoritaire, mais ils sont toujours soutenus et délimités par les preuves factuelles disponibles dans la littérature universitaire et dans les milieux politiques. Le Grand récit est délibérément écrit avec un minimum de jargon académique afin de convenir au plus grand nombre de lecteurs possible. Accessible et facile à lire, le texte reste pour autant solide d’un point de vue conceptuel et méthodologique. Pour interrompre le moins possible son flux, les multiples références à la littérature universitaire et aux ouvrages commerciaux apparaissent à la fin. Le Grand récit s’inspire principalement des entretiens et des conversations que nous avons eus avec les 50 penseurs et leaders d’opinion mondiaux sélectionnés entre juin et novembre 2021. Il est complété par de nombreuses autres conversations que nous avons eu le privilège d’avoir avec des dirigeants d’entreprises, de gouvernements, de la société civile, ainsi que du monde universitaire. En outre, il bénéficie de l’apport d’une session de brainstorming de deux jours organisée en novembre 2021 par le gouvernement des Émirats arabes unis à Dubaï avec la plupart de nos 50 narrateurs et certains de leurs pairs (un lieu des plus propices à l’élaboration d’un Grand récit, car, à notre connaissance, les Émirats arabes unis sont le seul pays au monde à disposer d’un «ministère des Possibilités», visant à construire de «nouveaux systèmes gouvernementaux pour l’avenir»). Il s’agit, en ce sens, d’un livre provenant de la communauté, le produit de la «sagesse éclairée» de la vision d’une foule (la communauté du Forum). Les attributions directes ont été réduites au minimum, mais toutes les personnes interrogées sont citées par leur nom lorsque nous faisons référence à leurs idées ou les citons textuellement. La liste des 50 contributeurs figure à la fin du livre. Nous serions ravis que ce livre permette à certains de nos lecteurs d’élargir leurs perspectives, et même qu’il incite certains d’entre eux à changer d’avis sur une question particulière et les aide à l’aborder de manière plus significative. Encore une fois, Le Grand récit est un appel à l’action et une plateforme pour faire avancer l’agenda sur certains des problèmes les plus critiques auxquels nous sommes collectivement confrontés. Le Grand récit est structuré en deux blocs principaux. La première partie concerne les problèmes. La deuxième partie aborde les solutions. L’introduction plante le décor. La première partie évalue les questions et les défis auxquels nous serons collectivement confrontés dans notre ère post-pandémique dans cinq macro-catégories imbriquées: économie, environnement, géopolitique, société et technologie. La deuxième partie examine les solutions et la voie à suivre à partir d’une grande diversité de points de vue, tant individuels que collectifs. La conclusion examine la manière dont nos mentalités et notre sens de l’optimisme, du pessimisme ou du pragmatisme peuvent nous aider (ou non) à naviguer dans le maelström actuel. La liste des principaux penseurs et leaders d’opinion mondiaux et leurs titres sont joints en annexe.
Politologue franco-américaine, spécialiste de la société américaine et des relations franco-américaines. Mon travail et mes personnages sont considérés comme des antidotes aux algorithmes. Je veux déc
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