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Bertrand Suchet

Bertrand Suchet

Bertand Suchet un personnage incontournable de l’industrie publicitaire. Onze ans à la présidence de DDB Paris puis fondateur de l’agence non-royaliste Louis XIV, il est aujourd’hui, entre autres choses, président du Club des directeurs artistiques. Et pour ne rien vous cacher, grâce à lui nous avons pu vous faire découvrir l’œuvre de huit jeunes photographes (Alexandra Taupiac, Margot Montigny, Barbara Bouyne, Ricardo Abrahao, Gabriel de la Chapelle, Jean-Vincent Simonet, Kate Fichard) présentés à Arles cette année dans le cadre de la première Galerie du Club des DA. Nous en avons donc profité pour en connaître plus sur celui qui conseille aux créatifs débutants « d’économiser un an d’impôts sur un compte étanche. C’est le prix de ta sortie, de ton indépendance. C’est le prix pour être maitre de ta destinée. »

Savez-vous que vous avez eu un des recrutements les plus chics de l’industrie publicitaire française ? « Débauché » alors que vous étiez serveur sur une plage de Saint-Tropez pour passer directement concepteur-rédacteur dans une filiale d’Havas.
Une question nous brûle les lèvres, ça ne vous manque pas le soleil quand même ?
Jeune, plusieurs métiers ou vocations m’attiraient, mais aucune voie royale n’y allait.
J’avais envie d’en découdre, de m’assumer et d’être indépendant. Et par tâtonnements successifs je suis presque arrivé là ou je voulais aller.
Je dis presque, parce que je considère avoir toujours été très loin de mon objectif.
Je voulais être animateur radio, je voulais être chanteur de rock, je voulais être barman, je voulais être plongeur sous-marin professionnel, et je voulais travailler comme créatif en publicité.
Plongeur, j’aurais pu, j’ai organisé des expéditions d’archéologie sous-marine dans l’océan indien, fait plus de trois milles plongées en Méditerranée, mais toujours pour mon plaisir et rien d’autre. La période dorée de La Calypso était bien finie. Chanteur de rock, une carrière éclair dont le point culminant et unique a été un concert pour la première partie du premier show en Europe des Cramps. En fait j’ai quasiment tout réalisé. Sauf la radio, et cela me gratouille fortement. J’ai même organisé la Nioulargue du début à sa fin durant 15 ans, aujourd’hui remplacée par les voiles de St Tropez . Barman, je l’ai été, à Saint-Tropez à la fin des années 70 et début 80, c’est d’ailleurs là ou le patron d’une grosse agence parisienne m’a proposé un stage. Et c’est là ou j’ai commencé mon périple publicitaire avec deux expériences magnifiques, mes années en team avec Voutch, aujourd’hui dessinateur à succès, et le lancement de ma propre agence Louis XIV. Les dernières années en tant que président de DDB, je ne me suis pas vraiment amusé. Ce, en dépit de la place dominante de l’agence dans les ranking créatifs.
Et donc oui, j’ai commencé la pub derrière un bar.
Et à ceux qui me demandent si le soleil ne me manque pas je réponds que j’en ai besoin pour boire de l’anis Berger et porter mes tongs de chez Rondini toute l’année. Oui, j’aime l’ail et oui, le soleil me manque.

Parlant de soleil, en tant que Président du Club des DA, vous avez créé, en collaboration avec Marie-Catherine Dupuy, une galerie à Arles pendant le Festival pour encourager et promouvoir des jeunes talents. Pourquoi ce choix ?
Quand j’ai commencé à m’occuper du Club des Directeurs Artistiques, nos professions, la plupart en tous cas, entraient dans une forte période de tourmente.
La dépression créative, la formalisation, la non-maitrîse de l’achat d’espace se mêlaient aux résultats financiers très moyens et donc nous exposaient à une double pression, celle des clients et celle des actionnaires. Cela a entraîné une forte baisse du nombre d’agences, et une baisse de moyens. Seuls deux ou trois agences avaient les moyens de garder leurs champions, attirés ailleurs.
Nous nous sommes vite rendu compte que le Club ne pouvait pas avoir sa destinée liée à la survie d’une industrie. Non seulement notre vocation est d’encourager et de stimuler, mais en plus nous nous sommes attachés à encadrer d’autres métiers tout aussi honorifiques que la création publicitaire.
Nous avons intégré le clip, la typographie, les effets spéciaux, l’habillage TV et bien d’autres.
La vocation du Club est le sourire et susciter l’envie. Nos métiers sont des métiers anti-crise par définition. Ils doivent être dynamiques et porter à leur tour des talents et des enjeux économiques. Nous sommes des arts appliqués. Au service de l’envie …
On n’imagine pas une seconde que la morosité nous atteigne. Cela signifierait que ce qui doit servir de bouée et crever..

On vous cite : « les baisses de budgets chez la plupart des annonceurs, le développement des banques d’images et des techniques de vulgarisation de retouches «home made» ont éloigné les jeunes créatifs des photographes ». Quelle est votre vision justement de la création publicitaire aujourd’hui ?
Nous sommes une société d’encouragement, et la photo a besoin d’être encouragée. Centrale dans la publicité durant plus de 30 ans elle a quasiment quitté les réunions des agences. Le siège réservé au photographe est aujourd’hui occupé par un roi de la PAO . Et hors marché du luxe, les créatifs ne pensent plus a faire réfléchir et travailler un photographe.
C’est inenvisageable.
La présence du Club à Arles sur laquelle Marie-Catherine Dupuy s’est investie avec succès, se veut une manifestation d’envies diverses, l’envie de faire connaitre de jeunes talents, l’envie de les faire connaitre à nos créatifs de tous bords, et l’envie qu’un jour ils fassent ensemble une pré-production avec un annonceur jovial. Et que le type sympa de la PAO retourne sagement dans sa régie, ou par ailleurs il est devenu un virtuose.

Le Club des DA est un formidable outil de promotion pour la création et pour valoriser les jeunes talents, comment imaginez-vous la suite pour l’année à venir ?
Le Club doit d’avantage faire connaitre ceux au service de qui il travaille. Nous organisons tous les ans une grande compétition avec plus de 2.000 travaux inscrits, nous récompensons les meilleurs, on les projette au mur durant la remise des prix, on les prime, et ils passent à la postérité dans notre livre annuel. C’est magnifique mais insuffisant.
Nous allons travailler avec une jeune société partenaire dans le but de faire vivre dans le temps, les travaux et leurs géniteurs, entre autres. Voilà ce qui nous manque principalement.

Moins sérieusement, tout le monde dit que c’était mieux avant, est-ce que vous faites parti de ceux qui diront que ça sera mieux après ?
Etait-ce mieux avant ? Je sais ce que je risque en disant ça, mais dans de nombreuses choses, la réponse est affirmativement et énergiquement oui .
Il y a bien sûr des secteurs où avant c’était moins bien. Mais les nôtres, c’est plus dur. Il y a néanmoins quelque jaillissements, quelques éclairs d’argent, tous les ans qui me font penser que les saumons atlantiques sauvages n’ont pas disparus.

Est-ce qu’aujourd’hui vous arrivez à regarder en entier une coupure publicitaire à la télévision française sans être désespéré ? Et comment est née selon vous cette insupportable régression dans la création publicitaire ?
Cette régression a une cause simple. L’achat d’espace a quitté les agences de publicité. Il est parti dans des centrales d’achat rebaptisées plus noblement agences média.
Quelle perte ? Ceux qui achètent ne sont pas créatifs, ceux qu’ils achètent non plus. L’achat est fait au kilo en dépit de l’efficacité et de la connivence. Plus d’effet de surprise pourtant déterminant dans la publicité. Les patrons d’agences ont perdu de leur influence et il est aujourd’hui très rare de voir une jolie campagne d’affichage ou en presse quotidienne, nationale ou régionale. Le média télé est devenu idiot, le magazine est devenu statique. Les média-planneurs ne sont plus avec les créatifs, à la presque source des idées.
C’est la cause N1, je le dis depuis le premier jour de la loi Sapin. Une jolie bêtise et preuve d’incompétence de la part d’un type qui porte le nom d’un résineux.
C’est a cause de lui si je ne peux plus regarder la télé.

Il y a une question toute simple que personne n’ose jamais poser aux publicitaires de renom, alors on va se permettre d’oser :
A quoi sert la publicité ?
Elle sert à rendre public un avantage, une renommée, de façon attrayante et distinctive. Elle doit bâtir une notoriété distinctive, elle doit compenser l’écart entre les gros annonceurs un peu balourds et les plus petits, moins riches mais plus navigants et réactifs ; plus talentueux, disons le.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes débutants qui aimeraient avoir le même parcours créatif que vous ?
Quand je donne des conseils à un créatif, je lui dis toujours la même chose depuis 20 ans.
Économise un an d’impôts sur un compte étanche. C’est le prix de ta sortie, de ton indépendance. C’est le prix pour être maître de ta destinée.
Aie la foi, une foi inébranlable. Ne mollis pas sinon tu es cuit. Ta détermination est une arme.
Travaille toujours avec ceux qui peuvent t’apprendre quelque chose en plus, ne travaille pas avec des gens moyens, prétentieux de surcroît.
Sois toujours sérieux, mais ne te prends jamais au sérieux.
Regarde toi souvent dans la glace. Non pas pour te trouver laid ou beau, mais pour te jauger, et être en accord avec ta conscience.
Ne copie pas, sois l’ennemi des voleurs d’idées.
Et ne pars pas forcément dans une agence qui t’appelle mais pose toi la question de rester là ou on t’appelle ; n’est ce pas là où il faut rester ?


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