A l’ère du clavier, du tout numérique, à l’heure où les kiosquiers disparaissent les uns après les autres, où la dématérialisation prend le pas sur le papier, sur l’objet, il devient presque nostalgique de se souvenir d’un de nos anciens modes de communication…
La carte postale, ancêtre du mail, avant-garde du télégramme, et désormais réservée aux parents désireux de faire écrire leurs enfants en vacances sous prétexte de donner des nouvelles à Mamie.
Mais ce petit bout de papier est bien plus. C’est devenu à notre époque une vraie attention. Moins facile et rapide qu’un sms. Elle oblige celui qui l’envoie à s’appliquer, prendre un instant, se poser pour dire un « je pense à toi » plus élaboré qu’un poke, qu’un like ou autres dérives comptant parmi les milliers de salutations ego-technologiques.
Comment donc s’empêcher de publier ces petites merveilles. Des cartes postales écrites par des écrivains comme Kerouac, Hemingway, David Foster Wallace, ou Fitzgerald.
Petit florilège de cartes envoyées par de grands écrivains.
1. Envoyée depuis l’hôtel Garden Of Allah sur Sunset Boulevard,très prisé par les célébrités, à été envoyée par Francis Scott Fitzgerald à…Francis Scott Fitzgerald. Timbrée mais jamais postée, elle a été écrite lorsque Fitzgerald officiait en tant que scénariste pour Hollywood, la légende dit que cette carte aurait probablement rédigée sous l’influence de l’alcool. Ce qui n’est pas surprenant lorsque l’on connait les penchants du chef de file de la « génération perdue ».
2. Cette carte postale de Madrid, envoyée par le jeune Ernest Hemingway à son mentor Gertrude Stein, poétesse et écrivain, marque un été très important pour Hemingway, parti voir des corridas en 1924. Récit des tournois auxquels il a assisté qui lui inspireront aussi quelques pages pour son roman Le Soleil se lève aussi, premier grand livre d’Hemingway.
3. Cette lettre est tout sauf une lettre d’amour. Envoyée par James Joyce à son éditeur, Elkin Mathews, cette carte lui demande de prendre une décision quand à la publication de son recueil Gens de Dublin, alors rejeté très violemment pour obscénité.
Gens de Dublin est devenu depuis un des classiques de Joyce.
4. Cette carte envoyée par Franz Kafka en 1913, est une carte moqueuse envoyée par l’auteur, encore inconnu à l’époque, qui préconise à son éditeur Kurt Wolff de ne pas écouter un certain Franz Werfel, lui même écrivain et visiblement contre la publication du plus grand roman de Kafka, La Métamorphose.
5. Cette carte datée de 1971 est une oeuvre d’Allen Ginsberg lui-même, éditée par l’Alternative Press, une société qui créait des cartes postales à partir de dessins d’artistes et d’écrivains comme Bukowski ou Norman Mailer. Il y raconte sa visite à Saint-Pétersbourg à la veuve de Kerouac quelques mois auparavant. Ecrite à un dénommé Ed White, qui a inspiré le personnage de Tim Gray dans Sur la route. Ed Withe alors architecte de talent, était un ami de Ginsberg et Kerouac. .
6. Cette carte, adressée à David Breithaupt par Kurt Vonnegut (écrivain américain à qui l’on doit le fameux Barbe Bleue) , raconte un évènement qui défrayé la chronique, à savoir l’aveu de Günter Grass (prix Nobel de Littérature) de sa collaboration au régime allemand et son enrôlement dans la Waffen-SS en 1944. Vonnegut se moque de lui en évoquant le fait que cette annonce allait faire sauter sa propre couverture d’ex SS, qu’il n’était évidemment pas. La silhouette en bas de la carte est celle de l’écrivain, qu’il utilisait comme signature unique pour toutes ses correspondances. Paranoïaque?
7. Celle-ci est le fruit d’une correspondance entre David Foster Wallace et Don DeLillo. Malgré une écriture illisible, on y décèle la description d’un palmier comme « cabinet de chiottes en briques » et quelque anecdotes au sujet d’un essai difficile a accoucher de Jonathan Franzen pour le New-Yorker.
8. Cette carte, écrite par Kerouac à un consultant littéraire très en vogue à l’époque, est une forme d’ultimatum à cet homme qui travaille à l’époque pour Viking Press, société d’édition la plus prisée de l’époque et notamment éditrice d’Arthur Miller et de Steinbeck. N’ayant pas apprécié les critiques de Malcolm Cowlez au sujet de son style trop difficile d’accès pour le grand public, Kerouac lui signifie qu’il quittera Viking Press si un contrat en bonne et due forme n’est pas signé avant le mois d’Octobre 1956.