C’est du Godard ?
-Non, c’est du Duras
-Ça parle pareil
-Oui ça parle pareil.
À la séance de 15h samedi dans la grande salle cinéma du Centre Pompidou affichant complet, il y avait un type qui dormait avant la projection de Navire night, d’autres qui ronflaient pendant dont un virulemment. À un moment je me suis retournée, la moitié du rang derrière moi avait les yeux fermés, à un autre moment moi-même je me suis endormie.
À la fin le type qui ronflait bruyamment s’est fait engueuler par d’autres qui somnolaient silencieusement.
Ce n’est pas du cinéma facile. Le commentateur a insisté : Marguerite Duras écrivain cinéaste, processus de soustraction, enlever, vider, soustraire : les noms, les corps, l’image.
– C’est le genre chiant, on déteste et on aime Duras autant que Godard ?
– Oui, je l’ai détestée longtemps sans l’avoir jamais lue, je n’étais pas à une mauvaise foi près. Et puis vers récemment, j’ai ouvert L’homme assis dans le couloir, Duras érotique. Je ne m’y attendais pas.
Je l’imaginais chiante, très chiante, avec trop de mots, de trucs compliqués, mais non. Les mots sont simples, saccadés, répétés, les textes courts, l’art de la périphrase. J’ignore s’il y a un propos, une histoire et je m’en fous. LE STYLE, je me laisse embarquer par le style. Là, il faudrait relire Barthes pour qu’on se mette d’accord sur l’importance du style. Si je veux une histoire, je lis un polar. Un début, une fin, une action, c’est simple, si je veux penser, je lis des essais. C’est souvent écrit comme la disserte d’un médiocre élève de terminale mais les idées sont là. Si je veux lire une écriture, je lis Céline ou Duras, Proust peut être mais je suis encore trop jeune.
Comme je suis du genre têtue, juste après ma sieste j’ai enchaîné avec l’expo Duras Song à l’étage au-dessus, ce n’est pas une expo facile je crois vraiment que rien n’est facile chez Duras et que justement c’est peut-être par là qu’il faut commencer à l’aimer parce qu’elle force à réfléchir sinon on peut aussi se rappeler qu’elle est créole, pauvre, que petite sa mère l’appelait misère, qu’à 15 ans, elle couchait avec un chinois un peu plus tard avec un juif ensuite avec l’ami du juif, qu’elle a été communiste, résistante, soixante huitarde, mitterrandiste, pro colonialiste, puis anti féministe alcoolique, qu’elle a insulté ses pairs qu’elle a vécu avec un homo en crachant sur l’homosexualité.