La définition de gourou est aujourd’hui totalement galvaudée puisque utilisée à toutes les sauces par les médias. Il n’y a qu’ à voir les titres de presse du moment :
« Docteur Frédéric Saldmann, le nouveau gourou du Tout-Paris. » ; « Onesta, le gourou du handball français. » ; « Procès Bettencourt : François Marie-Banier n’est pas un « gourou et manipulateur. » ; « Gourou de la téléphonie mobile, Hugo Barra sème le trouble entre l’Inde et la Chine. » ; « Chic ! : Fanny Ardant en gourou de la mode à la recherche de l’amour. »
Il y a donc plusieurs façons de définir un gourou. Avec douceur, cela peut-être un « Maître » spirituel, ou plus généralement une personne qui réunit des adeptes. Avec violence, un simple manipulateur d’un groupe religieux sectaire. Et avec parcimonie, un expert dans un domaine particulier. Difficile donc, entre orient et occident de trouver une définition unique qui fonctionne à tous les coups.
Pourtant le sujet va tomber sur toutes les tables culturelles cette année. Du cinéma en passant par les séries tv, la figure tutélaire du gourou va être partout. Tour d’horizon.
La série « The Leftovers » de HBO (renouvelée pour une deuxième saison, prévue pour l’été 2015) a commencé à mettre en scène des affrontements dangereux se préparant entre la population et un groupuscule aux revendications mystérieuses, largement comparable à une secte.
En production actuellement, la série tv « Aquarius » qui sera diffusée sur NBC avec David Duchovny et scénarisée par John McNamara, cette série racontera la façon dont un sergent de police de Los Angeles (Duchovny) enquêtera sur le leader spirituel d’une secte hippie dans les années 60. Ce gourou ne sera autre que Charles Manson, le criminel à l’origine du meurtre de Jay Sebring, Wojciech Frykowski, Abigail Folger et Sharon Tate, la femme de Roman Polanski.
En parallèle, l’acteur Will Arnett (connu pour son rôle dans « Arrested Development ») va collaborer avec la plateforme américaine Netflix pour « Flaked », une comédie lancée en 2016. Will Arnett incarnera le premier rôle dans cette série écrite par ses soins. Le comédien prêtera ses traits à Chip, un gourou auto-proclamé de Venice en Californie qui tombera amoureux de la nouvelle femme de son meilleur ami. Afin de maintenir les apparences, il s’empêtrera dans une série de mensonges.
Mais le projet le plus littéralement fou, on le doit au gourou Gurmeet Ram Rahim Singh qui vient de réaliser et d’interpréter « Messenger of God », une super-production Bollywoodienne qui met en scène une rock star douée de pouvoirs magiques. La bande-annonce comptabilise bientôt les 3 millions de vues.
Alors, mieux qu’avoir des millions de fans sur Facebook ou des millions de Followers sur Twitter, aujourd’hui la vraie plus-value pour qu’un producteur mise tranquillement sur vous c’est d’avoir plutôt des millions de fidèles. Ce qui est le cas de Gurmeet Ram Rahim Singh qui aime que ses millions de disciples l’appellent Dieu dans le film (et dans le vie réelle). Il est aujourd’hui accusé d’agression sexuelle et d’avoir soumis près de 400 disciples à la castration chirurgicale. En somme, une manière comme une autre de faire parler de soi.
Qui n’est pas sans nous rappeler une vidéo proprement hallucinante sur Youtube (qui tourne depuis un an et qu’on ne peut pas partager!) du gourou Rael qui montre comment le sexe est pratiqué entre lui et ses fidèles.
Le gourou affirme avoir vécu deux expériences de rencontres rapprochées du troisième type avec des extraterrestres qui sont les fondements de son idéologie. Il raconte avoir reçu la mission d’informer le monde sur ses origines et celle de construire une ambassade en vue du retour des Elohim…Et pour ce faire, évidemment il a besoin de gratifications multiples venues de ses plus jolies fidèles. Et franchement, c’est tellement surréaliste qu’on ne sait plus vraiment si nous sommes dans le réel ou la fiction.
Un peu comme à l’époque avec un Sébastien Tellier, s’amusant à se déguiser en gourou cheap lançant un mouvement bleu d’amour et de fraternité. Ou encore avec le film « The Master » de Paul Thomas Anderson (avec Joaquin Phoenix et Philip Seymour Hoffman) mettant en scène une relation hallucinante et surtout ambivalente entre un gourou et un ancien soldat.
On pourrait facilement en conclure il y a de moins en moins de modèles de vertus ou de référents auxquels se fier et que l’homme politique est de plus en plus considéré comme un guignol communicant bon an mal an à un public depuis longtemps absent. Le gourou, devient pour beaucoup, l’élément référent et rassurant sur lequel s’appuyer en période de doutes. On pourrait se demander si l’accélération du retour au fanatisme religieux n’en est une résultante ? Les prophètes ne seraient-ils donc pas d’une certaine manière, eux aussi des gourous comme les autres, à la différence, que leurs sectes auraient vraiment réussi ?