Il nous a soufflé avec Une minute de silence, un (très) court métrage dans le cadre du Mobile Film Festival. Une intensité impressionnante, une scène de dialogue tarentinesque tant les mots (ou leur absence) font monter la tension.
Alors devant ce petit film shooté au smartphone, on se dit qu’il y a là un grand talent. Et on se dit qu’il faut rencontrer ce jeune homme. Chose faite et désormais nous en sommes sûrs, Guillaume Renusson comptera dans l’avenir du cinéma français.
Entretien express avant de monter dans le train.
Puisque tu n’es pas encore connu, peux-tu te présenter ?
J’ai 22 ans, je viens du Mans, même si j’ai beaucoup déménagé. Après le bac, j’ai fait hypokhâgne khâgne, et après je suis parti en droit sciences pô pendant un an à Rennes, et puis, je suis venu à Paris pour un master scénario.
J’ai beaucoup travaillé depuis un an parce que mes parents étaient un peu inquiets de me voir partir dans le ciné.
Une Minute de silence est mon 3ème film, mon 1er avait déjà fait parler de lui, avec un joli casting (un César et un Molière) et tourné chez Gallimard (Un retour en avant, ci-après).
Ce week-end, je serai en final du Festival Travelling de Rennes dans la catégorie adaptation. On croise les doigts.
Le Mobile Film festival, je l’avais fait un peu comme ça, mais je ne me doutais pas que ça aurait un tel impact. J’ai rendez-vous avec plusieurs boîtes de production pour choisir avec laquelle je tournerai mon court pour lequel j’ai reçu 15.000 euros.
Je suis heureux, mais j’appréhende aussi beaucoup.
Tu peux nous expliquer comment on quitte le droit pour aller dans le ciné ?
Quand j’étais en terminal, je voulais faire du cinéma, mais je pensais que ça me limiterait si j’allais directement dans cette filière. J’ai voulu faire des études plus larges pour nourrir ma curiosité. Le ciné c’est l’amour de la curiosité.
Personnellement, je suis passionné par la direction d’acteur. Un réalisateur, c’est un peu comme un capitaine dans un sport collectif. D’ailleurs, sur mon premier court, j’avais l’impression du faire du sport. Il faut créer une énergie commune. Tout le monde peut être fatigué, mais le réalisateur tient la barque.
Bon, il faut aussi un bon scénario, pas que de l’énergie. Un film beau, mais sans fond, moi ça me frustre. Comme disait Clouzot, « un film c’est avant tout une bonne histoire, une bonne histoire et une bonne histoire. »
Comment te vient l’idée d’Une Minute de silence ?
Avec mon co-scénariste, Clément Peny, on travaille ensemble sur tous les projets. On écrit un long métrage d’ailleurs.
Sur ce film, on ne voulait pas faire une ellipse. On a recherché de l’intensité. Donc, on est vite partis sur la minute de silence. Ça semblait un concept intéressant. Et en plus, on évitait les soucis liés à la prise de son avec un téléphone. On a rapidement eu l’idée du film, mais on ne voulait pas, en une minute, faire un clip, ou une bande-annonce, on voulait faire du cinéma. Avec un début, un milieu et une fin.
Paradoxalement, sans un mot, c’est une superbe scène de dialogue. Vraiment bien écrite. Il n’y a pas un mot en trop.
C’est mon monteur qui assure cette partie. Moi, je me charge du rythme. Quand on a finit notre premier montage, on avait 1mn40. Panique. Il fallait couper presque la moitié. Donc, on a enlevé l’introduction. Et finalement, le film va vite, on ne s’ennuie pas. Faire un film d’une minute, de toute façon, c’est un exercice de style.
Je n’aime pas les scénarios trop démonstratifs, quand c’est ostentatoire, c’est vulgaire.
On trouvait ça intéressant de parler d’attouchement, avec les mains. Du coup, les enfants, qui sont bien-entendants, ont dû apprendre leurs lignes en langage des signes en une semaine.
La récompense, on n’y croyait pas. On a fini le montage le jour de la date limite à 23h. Je n’étais pas satisfait, je ne voulais plus l’envoyer. Finalement, il part à 0h10 et ils l’acceptent quand même. On avait des sous-titres jaunes, illisibles, quand on a été sélectionnés pour aller en final, on a pu les changer. Finalement, on est allés à la cérémonie sans y croire. C’est comme à l’école, quand tu penses avoir foiré ton devoir et que t’as 16.
Tu as rapidement évoqué un long métrage, tu peux nous en dire un peu plus ?
Un peu, oui. C’est un film sur le parcours carcéral de Patrick Dils, la plus grande erreur judiciaire du XXème siècle. Je l’ai rencontré, gagné sa confiance. C’est un biopic avec un vrai point de vue sur la prison. On a la chance d’avoir Patrick Dils en superviseur. Il ajoute des détails à l’histoire. Passionnant.