L’actrice et réalisatrice Fabeille Tardy signe un docu-fiction bouleversant sur une génération meurtrie et sacrifiée par deux ans de pandémie. Elle pense « qu’il est important, en tant qu’artiste, d’oser montrer la réalité sans forcément prendre partie. Mais de prendre le temps de se pauser pour voir les choses clairement, à travers ses yeux, les yeux des autres et ceux de toutes les générations. Aujourd’hui, il est devenu nécessaire de montrer, de décrire, de dire ce qui ne va pas, mais aussi de dénoncer les injustices. Pour toutes celles et ceux qui ne peuvent pas le faire, ou qui n’osent pas. En tant que réalisatrice, je souhaiterais être la voix de celles et ceux qui se sont confiés à moi. Qui ont failli passer la rambarde. Leur dire qu’elles/ils ne sont pas seuls et que nous sommes nombreux à vouloir les aider à se relever. L’espoir fait vivre, l’amour aussi. Et je parle de l’amour inconditionnel, celui qui nous unit tous. »
Le court-métrage est inspiré de faits réels ; nous y suivons la vie quotidienne de Mia, une jeune femme qui se retrouve seule dans son appartement pendant le confinement. Dès la première scène, nous la retrouvons assise dans sa baignoire, nue, les cheveux mouillés, son pommeau de douche semble pleurer. La solitude surplombe le tout, accompagnée par la mélancolie du piano. En voix-off, Mia commence à nous raconter son histoire :
« Que devient-on lorsqu’on a plus rien pour vivre ? Pour respirer ? Pour croire ? Quand tous les espoirs disparaissent au fur et à mesure des décisions prises par ceux qui nous gouvernent ? Ainsi qu’ils laissent mourir à petit feu les nouvelles générations. Que restera-t-il de ceux qui se battent pour leurs droits, pour la vie, pour leurs rêves ? »
Difficile de savoir si Fabeille Tardy interprète son propre personnage, ou bien si elle le vit, tout simplement. En tout cas, l’authenticité de son jeu se mêle à merveille avec la gravité du message. Le désespoir et la souffrance de Mia envahissent le spectateur dès les premières minutes. Jusqu’à la fin.
« Je suis en train de devenir folle », s’exclame-t-elle. Être enfermée, ne plus pouvoir sortir, ne plus avoir accès aux loisirs, ne plus pouvoir voyager ou faire la fête dégradent sa santé mentale.
« J’ai tout perdu, alors pourquoi continuer ? L’art, le théâtre, le cinéma, les études, la restauration. Tout ce qui permet de rassembler, d’être ensemble, de faire penser, quelle ironie ! Nous ne sommes pas essentiels, alors pourquoi se battre ? Pourquoi ? On nous écoute pas, on est obligés à tout. À tout. Et à leurs yeux, nous ne sommes rien. Rien. »
Le court-métrage dénonce également le fait que les emplois détruits ont été ceux des plus précaires, tandis que les plus riches ne respectaient pas les mesures sanitaires mises en place… Quelques mensonges gouvernementaux sont mis en exergue pour parfaire le triste tableau. Là, l’histoire touche à sa fin et l’on comprend mieux pourquoi les taux de dépressions et de suicides ont explosé pendant cette « pandémie mentale ».