Jay McInerney « ne sait pas s’il écrira un autre roman. » Parce que Bret Easton Ellis ne va pas très bien en ce moment. Il passe beaucoup trop de temps sur Twitter face à ses 439000 followers. Comme à la recherche de son temps perdu, de sa jeunesses oubliée.
Pour faire simple, Ellis s’est fendu de plus de 2000 tweet à 140 caractères. Le calcul est vite fait, ça fait plus de 280000 signes envolés dans l’air digitale.
Il s’intéresse bien moins au roman, à la fiction, il ne s’en cache même plus.
Aujourd’hui il parle comme un publicitaire, il veut « créer du contenu ».
Alors il écrit entre deux tweet une mini-série sur Charles Manson pour la Fox.
En même temps il signe aussi des clips, façon court-métrage, pour se faire la main. Il aime penser qu’il fabrique de petits films impressionnistes. L’influence sans doute de Los Angeles. Sauf que maintenant l’écrivain s’affronte aux producteurs et non plus aux éditeurs. Et c’est là où le bas blaise. Pour un producteur Hollywoodien Ellis n’est qu’un écrivaillon de plus, à la mode. On se sert de son nom comme une marque. Ni plus. Ni moins. Sa liberté en prend donc un coup, normal. Quand on écrit seul chez soi, on est son propre producteur. Quand on doit tourner une scène de cinéma, même simple, il faut tout de suite des centaines d’intervenants. Forcement, il n’est plus le maitre à bord. Ça n’a pas l’air de le déranger puisqu’il insiste.
Et puis, au XXIème siècle il est plus chic pour draguer de raconter sur Twitter qu’on écrit des films plutôt que des romans.
En même temps pourquoi un romancier n’aurait il pas le droit de vouloir séduire sur les réseaux sociaux ?
Le mythe de l’écrivain reclus et acariâtre est mort et enterré, et comme on le soupçonne d’avoir encore un quart d’heure d’avance sur l’air du temps, il est fort probable que la généralisation et la démultiplication des écrans l’ait conduit à se réorienter professionnellement. En bon quinquagénaire, qui veut prendre le train en marche sous une dictature du flux inarrêtable, il modifie son C.V en passant d’écrivain à scénariste. Une image valant mille mots, c’est plus reposant pour lui.
Même si son dernier roman Suite(s) impériale(s), comme son dernier film The Canyons ont été bâclées et sans aucun supplément d’âme.
Difficile de ne pas en être conscient. Alors pour brouiller les pistes et rester banché, il signe des films pour Placebo ou pour les Dum Dum Girls à qui il avait tapé sans autorisation leur musique pour son dernier long métrage. Il fallait qu’il se fasse pardonner avec un peu plus qu’un message sur twiter. Qui ne doit être, d’ailleurs, à ses yeux plus qu’un vulgaire confessionnal contemporain. En attendant, l’air de rien, on perd l’un des plus grands romanciers du siècle passé, alors, tous à vos Twitter pour essayer de convaincre l’animal de se remettre face à ses pages blanches, avant qu’il ne soit trop tard…